The Darkness : I Believe In A Thing Called Love
Voilà, ça y est, il fallait bien que cela arrive. 2004 sera Queen ou ne sera pas. Pour ainsi dire et pour généraliser suffisamment : 2004 sonnera le grand retour du rock chevelu. Le single de The Darkness, et son clip, est un vaste recyclage de tous les bons vieux gimmicks du groupe de Freddie Mercury. Faire la liste de toutes les références semble une tâche infinie. Rien que pour le clip, là, tenez : le décor et les claps de Radio Gaga, les guitares qui lancent des éclairs de A Kind Of Magic, les choeurs en ombres de Bohemian Rhapsody, la moustache et les mimiques de Freddie Mercury, les cheveux et le jeu de scène de Brian May, etc... On ne les compte plus. Pour la musique, c'est encore pire. Rien que le titre (I Believe In A Thing Called Love) forcément en hommage au Crazy Little Thing Called Love de Queen. La voix, bien sûr, même si on pensera finalement plus à tant d'autres chevelus rockers craignos (David Lee Roth, en particulier). Les riffs de guitares, à la limite du plagiat. Les paroles débiles façon Spinal Tap. Spinal Tap, bien sûr, les grands papas évidents de The Darkness, groupe à la fois parodique et tout à fait sérieux, comme l'était Queen. Bref, grâce à ces crétins là, on peut enfin assumer totalement sa passion pour Queen, la bande son ultra tendance du printemps taquin (cf. mon petit dossier quelque part sur ce site). On entonnera jusqu'au bout de la nuit Fat Bottomed Girl et Hammer To Fall, jusqu'à pas d'heure on s'époumonera sur Seven Seas of Rhye et Gimme The Prize. Bref, ce sera le grand soir tous les soirs !
Jessica Simpson : With You
Insoutenable. Je veux bien être objectif, de temps à autres, pas trop souvent, sinon c'est mauvais pour mes nerfs. Mais là. Là. Quand même. Non. On le fait exprès. C'est impossible, autrement. Non. Franchement. Non. Vraiment. Non. N'insistez pas. Non. Jessica Simpson, vague clone de Britney, ayant miraculeusement survécu à la mort clinique de la bubble teen pop de la fin des années 90, revient (mais elle n'était pas vraiment partie, il faut le dire), avec un truc immonde. Non. Pire qu'immonde. Un truc... un truc... inqualifiable... Sur un vieux sample de Mariah Carey (il me semble), et sur un refrain qui gratte l'acné d'Avril Lavigne, Jessica miaule, minaude, mérite des baffes. Je ne suis pas un violent, moi, madame, mademoiselle, monsieur. Je suis un être pacifique, moi. Mais là. Là. Non. Vraiment. Non. On jurerait qu'une copine pipeuse de Muriel s'est mise à la chanson. Non. C'est trop. C'est l'antithèse de tout ce que j'aime. L'antithèse. Le contraire absolu. La négation radicale. C'est presque douloureux à regarder et à entendre. On se dit qu'on ne peut pas nous faire plus de mal. Non. Mais là, tapis dans la poussière grise qui s'accumule dans les coins gluants de la cuisine de Jessica, d'autres monstres, bien plus effroyables encore, nous guettent, n'attendant que la fin de la coupure pub pour nous sauter à la gorge...
Yeahs Yeahs Yeahs : Maps
Fermez les yeux. Faites comme si vous ne saviez rien de cette chanson, de ce groupe. Bon, pour peu que vous ayez un peu traversé les années 80 "rock" ou du moins que vous en ayez une petite connaissance, vous allez tomber de votre fauteuil. En effet, la charmante Karen O possède EXACTEMENT la même voix que Chryssie Hynde (et accessoirement la même coupe de cheveux), la muse des Pretenders. Etonnant, non ? Et à part pour quelques envolées de guitares un peu sales, ce Maps pourrait parfaitement être un morceau des Pretenders. De plus, le clip, très sobre, très classe, en cinemascope et tout le tralala, a un petit côté punk/pop/chic qui correspond parfaitement à l'esprit des Pretenders. Bref, ce n'est pas Brass In Pocket (tout récemment chanté par Scarlett Johansson dans Lost In Translation), mais presque. Tout cela est parfaitement troublant. Et même si la chanson est vraiment trop en retrait et que l'on aimerait enfin voir et entendre quelque chose de différent, les Yeahs Yeahs Yeahs font cela avec application, retenue et un certain talent. A juger à la lumière de leur futur deuxième album.
Hilary Duff : Come Clean
On dirait une parodie. Rien que son nom. On jurerait une blague de Jack Black ou de Liam Lynch. Hilary Duff. Sa grande maison vide. Ses potes glandus. Son maquillage qui coule. Ses seins omniprésents. Ses faux airs de Britney Spears, période Sometimes. Son infecte petite rengaine teenage, à mi-chemin entre la Bit-Bit sus-citée et Avril Lavigne. Hilary Duff. Un nom de bière.
Evanescence : My Immortal
Après le tube néo-métal toc, voici la ballade goth pour faire mouiller les pré-pubères. Et vas-y que ça oeuvre dans le décorum kitsch ! Et vas-y que je te remets une couche de noir et blanc pour bien souligner que tout cela c'est tellement 19e, voyez, romantique, tout ça, voyez, Chateaubriand, Baudelaire, voyez, et puis Lestat et Buffy, aussi, tant qu'on y est. Et vas-y que la chanteuse, sosie de la Nolwenn nationale, a l'air très mélancolique. Parce que c'est de l'amour romantique, éternel, brûlant, Titanic et tout qu'elle cause dans la chanson. Des trucs très très puissants que seuls les vampires (du pire) peuvent comprendre. Des trucs pour les gens très très sensibles. Hyper mega ultra sensibles, même. Mais bon, comme cela s'adresse aussi au pré-pubères, il y aura beaucoup de plans de son décolleté choucard à la donzelle. On peut ainsi remarquer qu'elle a une grosse voix. Y a pas à dire. Elle a du coffre. Et elle brame, tel le seigneur des bois, le cerf majestueux, lorsque la saison des amours lui portent lourdement sur son intériorité masculine tourmentée. Elle brame, donc. Sur une mélodie baveuse qu'un piano douteux déverse comme on gerbe le mauvais alcool des soirées romantiques très très sensibles et tourmentées, quand la saison des amours fait résonner les cloches lugubres de nos intimités en rut.
Antonn Kareen & Bonnie Tyler : Si Demain/Total Eclipse of the Heart
Non mais n'importe quoi... Et pourquoi pas Garou et Meat Loaf ?
Les Connards : Comme des Connards
Michael Youn est-il le Andy Kauffman français ? Ou le nouveau Patrick Sébastien ? Le doute m'habite.
Lorie : Week End
Sk8ter Boy de l'autre greluche, revue par une pub pour une boisson gazeuse, et interprétée par la chanteuse la moins gracieuse de l'histoire de l'humanité (Mireille Mathieu à côté c'est Deborah Harry). Le programme est follement transcendant et fait virevolter nos sens vers une extase inoubliable. Une extase en creux. Il va sans dire.
No Doubt : It's My Life
Difficile de comprendre pourquoi cette reprise sans imagination et sans grâce de l'un des tubes du Talk Talk pré-post rock, a redonné à No Doubt autant de crédit auprès de la critique et du public. Franchement, on peut circuler sans remords, ni regrets, il n'y a rien à voir, il n'y a rien à écouter. A part peut-être pour se moquer de la dégaine de Gwen, sport fort pratiqué en ces lieux il n'y a encore pas si longtemps. Mais on se lasse même des meilleures choses...
The Offspring : Hit That
Oh non, pitié...
Kelis : Milkshake
Oui, je sais, je n'aime pas grand chose quand il s'agit de traîner mes guêtres dans le monde de la musique pour tous et toutes. Celle qui passe sur les radios populaires et sur les chaînes vaguement musicales (mais surtout publicitaires). Mais quand c'est bien, je le dis. Et là, c'est très bien. C'est même carrément excellent. C'est LE single de ce début d'année. C'est indécent, bizarre, érotique, malin. Fantastique. Pour une fois tout le monde aime, et je suis d'accord. On en profite, on s'en félicite, on se prend dans les bras, on lève son verre, on trinque, c'est la fête !
Muse : Newborn
1995 : Jeff Buckley, c'est la classe. 1997 : Paranoid Android, c'est la classe. 2004 : Muse, c'est la honte.
Beyoncé : Me, Myself & I
Après l'écoute de son album, Dangerously In Love, et comme vient le confirmer ce single ; Crazy In Love et son sample hallucinant, n'était qu'un heureux accident au sein de la carrière solo de Beyoncé. Car, mis à part ce formidable coup d'éclat qui a durablement traumatisé le petit monde de la pop, l'interminable album de la demoiselle est un horrible flan r'n'b dégoulinant, à peine digne des pires heures de Mariah Carey (j'exagère, sans doute, mais si peu). Même le duo avec Missy Elliott groove comme une tortue centenaire. Pas d'âme, pas de mélodies, pas de rythme, rien. Alors, oui, Beyoncé peut se déshabiller à la moindre occasion et adopter toutes les pauses lascives de son répertoire, ce n'est pas cela qui lui offrira l'indulgence du jury. Quand on nous a donné un Crazy In Love, il est impardonnable de retomber dans les pires travers de la soupe MTV la plus indigeste. Aller, une fessée et au coin. Non, mais !
Black Eyed Peas : Where Is The Love ?
Si vous cherchez bien, au cœur de l'un des premiers Edwood VS MTV, vous trouverez l'équarrissage du Torn de Natalie Imbruglia, matrice honteuse de ce déchet musical nauséabond qu'est Where Is The Love. Comme quoi, parfois, quand on recycle les détritus, et bien ça donne des résultats encore plus dangereux pour l'environnement. En même temps, on peut enfermer ça précieusement dans un coffre que l'on enterrera bien au fond d'un canyon pittoresque. Juste pour faire une mauvaise blague aux archéologues des générations futures qui nous maudiront d'avoir eu un humour de si mauvais goût, nous, leurs ancêtres si indignes.
Dido : White Flag
Cela ne doit plus marcher très fort pour la pauvre Dido (j'ai bien dit D.I.D.O., hein, bandes de cochons anglophones !), car la voilà obligée de vendre sa musique sur la seule foi de son décolleté. Certes, elle n'est pas la première à le faire et bien d'autres avant elle en ont même tiré de longues et prolifiques carrières. Mais ça fait quand même bizarre, tant la Dido a l'air assez embarrassée, voire pas du tout à l'aise, de nous exhiber ainsi ses atouts féminins timides. Bref, même si on pourrait croire que tout cela est quand même très intéressant, on est quand même gêné par tout ce voyeurisme et toute cette prostitution. De plus, il y a la musique, insupportable, et le mot est bien faible. Une ballade dégoulinante, toujours la même, qui déprime et qui consterne. Glauque.
Pink : God is a DJ
Contrairement aux apparences, ce n'est pas la reprise du tube ultra ringard de Faithless, mais bien un nouveau crime perpétré par ma Nemesis préférée, l'incontournable Pink. Venue nous pourrir l'hiver à la force d'un nouvel album ignominieux, comme toujours, Pink se lâche méchamment dans la nullité avec ce single incroyable. Dans une symbiose impeccable, les images du clip et la musique nous offrent un vrai petit best of de tout ce qu'il ne faut pas faire en 2004. Sauf si on veut passer pour le dernier des barbares. D'une complaisance grotesque et d'une agressivité mesquine, God is a DJ fait honneur à la carrière définitivement misérable de cette brave Pink. Mais arrivée à ce niveau de néant, je me demande pourquoi je prends encore la peine d'être aussi méchant. Ce n'est pas très drôle, c'est plutôt énervant et la chose n'a même pas besoin de moi pour se ramasser tous les platanes du bord de la route. Le seul problème, c'est que Pink, pour l'instant, c'est du construit pour durer, ce genre de choses. Il y a même, mais je n'ose le dire, mais il paraîtrait, peut-être, donc, qu'il y a des gens qui... aiment... des gens qui aiment. Des gens qui aiment Pink. Qui l'apprécient. Lui trouvent des qualités. Bref, enfin, des gens qui écoutent. Ou qui pourraient écouter. Des gens qui trouvent cela "rock'n'roll", voire "punk". Mais bon, en même temps, c'est comme les OVNI et le monstre du Loch Ness, ça, on demande à voir, avant d'y croire.
The White Stripes : The Hardest Button To Button
C'est bien sûr mon grand retournement de veste de la période, d'un coup, soudain, je me suis mis à aimer les White Stripes. Le côté ludique de leur musique (parfaitement illustrée ici par un clip fauché et rigolo) m'a soudain touché, là, comme ça, hop ! Ca y est, on est là pour s'amuser. Et on s'amuse. Du rock carré, basique. Meg cogne, Jack gratte et minaude. Ca sonne bien, ça sonne clair, ça sonne costaud. On accroche et on se laisse porter. Mon conseil pour le prochain single : le fabuleux Little Accorns. Et pour tout avouer, c'est bien sûr depuis que j'ai lu que Meg White ne portait jamais de maquillage que je suis fan. La classe, on l'a, ou on ne l'a pas. Pour l'instant, les White Stripes l'ont, alors on en profite, et on se posera des questions plus tard. Soit comme l'écureuil, girl, soit comme l'écureuil...
Christina Aguilera : The Voice Within
La chanteuse d'Evanescence, non, pardon, Nolwenn, enfin, Christina, donc, nous sort le noir et blanc, la robe blanche, le décolleté et la voix puissante, comme tout le monde, bref, et attention, c'est de la ballade "habitée", pleine d'émotions, très personnelle. Une oeuvre où Christina dit des choses importantes sur elle, sur le monde, sur nous. On se doit de l'écouter, il y a de l'amour, de la philosophie, des choses essentielles là-dedans. Ca sort de l'intérieur, qu'elle nous dit. De là à dire que c'est le "vent mauvais" chanté par Gainsbourg... Mais on n'est pas là pour rigoler. Attention. Surtout pas. C'est important tout ça...
Britney Spears : Toxic
Un sentiment d'occasion manquée accompagne la sortie en single de Toxic. Il fut un temps question que monsieur Tim Burton soit convié à la mise en images de la meilleure chanson de miss Bit-Bit. Malheureusement, la post-production et la promo de Big Fish ont empêché la collaboration d'avoir lieu, au grand regret de monsieur Burton, paraît-il. Et c'est mille fois dommage, tant l'apothéose pop vicieuse de Toxic aurait méritée un écrin autrement plus ambitieux que cette banale débauche d'effets spéciaux qui ressasse Matrix, Charlie's Angels, Blade 2 et Resurrection of the Little Match Girl (enfin, non, mais presque...). Les quelques audaces un peu cochonnes, un peu agressives, un peu bizarres, sont délayées dans un mauvais goût visuel qui peine et échoue à transcender une Britney toujours aussi fade. On ne peut décidément pas la prendre au sérieux, quand bien même on lui offre une chanson fantastique.
Un riff de guitare surf façon Faye Wong, un glissement de violons façon Danny Elfman, une rythmique qui ne fait pas de prisonniers, un chant qui attaque sous la ceinture, quelques dissonances qui n'ont pas à rougir face à une Kelis au mieux de sa forme, Toxic est ce que Britney Spears nous a murmuré de plus adorable, aux côtés des inoubliables Slave 4 You et Boys. Mais voilà, comme toujours, même quand elle tient au bord des lèvres la chanson qui assassine sur place, la magie n'est pas là, le manque de sincérité crève les yeux et tout cela ne respire que le putain de travail bien fait et puis basta ! Alors, oui, on peut s'en contenter pour un petit plaisir à la sauvette, de temps en temps, juste pour quelques semaines d'une saison grise.
Mais après ? Comme Madonna, Britney veut à toute force s'inventer du glamour, s'inventer du mystère, s'inventer une personnalité, quitte, comme la Ciccone, à n'en avoir aucune à force de toutes les essayer et de les remiser au placard après un single (voire deux, mais pas plus). La peur, légitime, d'être dépassée, de se voir évincer du cœur des consommateurs qui écoutent de la musique comme on zappe devant la TV ou comme on jette les vieux magazines une fois lus, finit par tourner à la névrose artistique. Derrière le produit, il y a du talent. Devant ce Toxic, c'est une évidence, de très nombreux talents, qui essaient de faire leurs trucs au top, toujours au top, pour être devant, pour vendre maintenant, tout de suite, pour que les gens les aiment, maintenant, tout de suite. Et qu'importe la postérité, qu'importe la sincérité, il faut foncer droit devant, car la semaine prochaine, on sera déjà éjecté des "charts". L'essence de la musique "pop" est ici, en résumé, ou même dans sa plus pure incarnation. Une musique pop lavée des révolutions des Beatles ou de Phil Spector. La pop jetable, la pop kleenex, la pop de l'instant, la pop du soir sans lendemain. Dans ce grand écart entre plaisir évident, instantané, immense, et commercial spectaculaire outrancier, Britney Spears, son album In The Zone, ce single Toxic, sont des chefs-d'œuvre, des incontournables, des monuments. Pour un soir. Et c'est bien là tout ce qu'on leur demande. |