The Go! Team. Le simple fait d’écrire le nom du groupe provoque la montée d’adrénaline. Au fil des années, leur premier opus, Thunder, Lighting and Strike s’est imposé, non seulement comme l’un des plus grands disques de la décennie 2000, mais aussi comme le plus puissant antidépresseur musical du monde connu. Il ne se passe pas encore un mois, que dis-je un mois ! Il ne se passe pas une semaine sans que je ne me sente physiquement obligé d’envoyer à fond l’album au matin, ou même carrément sur le lieu de travail, en boucle, de préférence. Leur effort suivant, Proof of Youth était un faux remake. Car il faut rappeler que l’une des qualités premières de Thunder est d’être aux trois quarts instrumental. Même lorsque les MCs débarquent, elles sont noyées dans le mix, instruments parmi les autres. Proof of Youth jouait la carte de vraies chansons, parfois pour le meilleur (Doing It Right, Fake ID) et plutôt pour le pire, du moins, le moyen.
La même inquiétude saisit au début de Rolling Blackouts avec l'ouragan T.O.R.N.A.D.O. Retour de Thunder, avec le format chanté de Proof of Youth. Nouvelle déception ? Non. Car cette fois les morceaux sont à la hauteur. Et les spectres de Thunder sont davantage présents. Ne le cachons pas, The Go! Team c’est toujours la même chose. Une recette délivrée avec une énergie renouvelée, mais sans grande surprise. La seule puissance du groupe étant sa capacité à faire exploser la pop la plus incroyable. Du « Wall of Sound » de Phil Spector en passant par la soul de Sly, le hip-hop des Beastie Boys, les collages des années 90… Tout est là. Superposé. En avalanche. Mais pour le coup, la musique seule ne se suffit plus. Les instrumentaux sont des relectures à la note près de ceux de Thunder (Bust-Out Brigade, Super Triangle), ils sont aussi beaucoup plus courts, conçus comme de simples interludes.
Rolling Blackouts marque le triomphe des chansons. Ninja, Kaori et Chi (oui, on dirait une team de manga) sont les véritables stars. Le point d’orgue est l’hallucinant Buy Nothing Day, qu’il sera d’hors et déjà difficile de détrôner au titre de single de l’année (sauf si PJ Harvey édite The Glorious Land sous ce format). Tout l’album est ainsi touché par la baguette de la bonne fée de la pop. Secretary Song et ses « echo echo echo », Apollo Throwdown et sa construction en grand 8, Ready to Go Steady la chanson perdue des Shangri-Las, Voice Yr Choice pour envoyer paître les prétentions de Gorillaz. Le morceau Rolling Blackouts va jusqu’à flirter avec une évidence « noise », quelque part entre Slowdive et les bonnes heures d’Asobi Seksu. Les réjouissance s’achèvent sur le festif Back Like 8 Track, comme une soirée qui ne voudrait et ne devrait jamais s'achever.
Au fil de cette chronique, je ne cessais de me répéter cette conclusion bien proprette : « S’il s’agissait d’un premier album, Rolling Blackouts mériterait une note très élevée, au moins un bon 9/10, mais voilà, c’est un remake, une resucée, de haute tenue, mais déjà connue. » Cela sonnait bien, mais finalement sous couvert d’objectivité, c’était malhonnête. Thunder, Lightning and Strike sera toujours unique. C’est aussi devenu l’un des mes disques favoris, essentiels, vitaux. Il est à 5 étoiles et sans doute un peu au-dessus. Qu’importe. Ici on ne critique pas à l’objectivité, ni à la demi-mesure. Rolling Blackouts, logiquement du même tonneau, pas vraiment un clone, suffisamment différent, est le petit frère adorable de l’aîné prestigieux. Et qui suis-je pour dire que je préfère un fils à l’autre ? Ce n’est pas un album qu’on écoutera qu’une saison, pour suivre la mode, ou parce qu’on finira forcément par s’en lasser. L’année prochaine, aux premiers jours de soleil, il sera de retour. Aux soirs d’été aussi. Et pour donner la vie qui manquera aux premiers matins glacés d’automne. Il sera là aussi. Mon devoir est donc logique : écoutez Rolling Blackouts, bon sang !
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