Panic Room
de David Fincher
Très
fraîchement accueilli lors de sa sortie, car tout le monde attendait un nouveau
Fight Club, Panic Room est à revoir chez soi, une fois toute la pression
évacuée. Et l'évidence saute alors aux yeux, derrière la mise en scène souvent
étouffante, Panic Room est un splendide thriller sans prétentions. Et c'est
inestimable. Fincher ne "dit" rien dans ce film, il n'a aucun avis sur la
religion, la société, la fatalité, l'amour, la culpabilité et toutes ces sortes
de choses qui ont hanté son œuvre jusqu'à présent. Et finalement, on s'en fout.
Panic Room se présente comme un divertissement, un exercice de style pour faire
plaisir à tout le monde. Et il faudrait être sacrément de mauvaise foi pour oser
affirmer que l'on ne prend pas plaisir à la vision de ce suspens peu original
mais magiquement efficace. Oui, l'histoire en elle-même est sans surprise, on
comprend dès le début que Forest Whitaker est sympa et que Raoul est le super
méchant. On sait dès le début que tout finira bien, dans la morale la plus
claire, la plus limpide. Et alors ?
Alors ? Tout
le monde attendait de Fincher, ce grand brouilleur de pistes, qu'il révolutionne
le genre, qu'il fasse exploser les frontières, qu'il nique la morale comme il
avait pu le faire dans Seven ou Fight Club. Et justement, tel un David Lynch
enchaînant Lost Highway et Une Histoire Vraie (toutes proportions gardées),
Fincher n'est pas du tout là où on l'attend. Ne faisant ni du Kubrick (pour une
fois), ni vraiment du Fincher (à part au niveau de la réalisation). Résultat ?
On oublie rapidement à qui l'on à faire et on entre dans le film. Mieux, au bout
d'une demie-heure, la mise en scène s'efface peu à peu, on ne fait plus vraiment
attention à tous les effets spéciaux qui construisent les plans séquences
impossibles. On s'intéresse à ce qui se passe à l'écran. On admire Jodie Foster,
en débardeur, toujours penchée ou à quatre-pattes, ce genre de choses. On se
régale d'une succession de situations stressantes, où la question merveilleuse
est toujours : "mais comment vont-ils s'en sortir". C'est prenant, c'est
impeccable, c'est du grand cinéma.
Panic Room en
DVD est un petit bonheur, tant la qualité de l'image et du son fait honneur à la
sophistication du film. Par contre, il n'y a pas de bonus. Vous voyez le piège.
Un peu comme pour les premières éditions de The Game et de Seven. Ca sent
l'édition collector pour bientôt. Ou pas. Car, contrairement aux précédents
Fincher (Alien 3 mis à part), il n'y a rien à dire sur les alentours de Panic
Room. C'est un film carré, fermé sur lui-même, un huis-clos intégral, dont on se
moque bien de savoir comment il a été tourné. On n'a pas envie de percer les
mystères de la Panic Room. C'est du cinéma de divertissement, du classique, du
basique, du travail de pro. Le reste n'a que peu d'importance. On voulait avoir
peur, sauter sur son siège, ne pas s'ennuyer. On en a eu pour son argent.
Forcément. Quand les metteurs en scène "auteurs" oublient parfois leurs
prétentions et font du cinoche du samedi soir, et bien ça donne souvent de
grands petits films. Des classiques du divertissement. Donc ? Donc le genre de
films qu'on ne cessent de revoir pour le plaisir. Juste pour le plaisir.
En résumé : Excellent thriller, brillamment mis
en scène, sans prétentions autres que visuelles, Panic Room peut très bien
entrer dans les indispensables de la DVDthèque. Si de surcroît vous êtes fans de
Jodie Foster (sublime) ou de Forest Whitaker (parfait), vous ne pouvez vraiment
pas vous en priver. Dans tous les cas, si vous aimez prendre du bon temps devant
un suspens clair, net et précis, Panic Room risque de vous enthousiasmer au-delà
du raisonnable. Un délice. |
Irréversible
de Gaspar Noé
Peut-être
est-ce dû au fait que je ne l'ai pas vu en salles, mais seulement en DVD, qui
m'a conduit à ne pas trouver le dernier Gaspar Noé aussi "insoutenable" que l'on
m'avait raconté. Même si le film fait tout pour choquer le bourgeois et exposer
complaisamment les frustrations de son metteur en scène, on a vu bien pire
ailleurs. La scène gore dans la boîte de nuit respire l'image de synthèse et
n'atteint pas la cheville du moindre scalp de Maniac. Quant à la si commentée
scène de viol, on voit pire et plus choquant dans le moindre film pornographique
(insultes y compris). Non, ce qui met sans doute le plus mal à l'aise au début
du métrage (à la fin de l'histoire, donc), c'est l'impression de découvrir un
film "Dogme" passé en accéléré. Ca tourne, ça virevolte, ça fait du bruit, on
n'y comprend pas grand chose, mais ça a l'air horrible. Un peu comme si on
couplait la Space Mountain de Disneyland avec un train fantôme. C'est le grand
8, le rollercoaster, on peut même y prendre un certain plaisir. Même si, dès les
premières images, Noé cherche à exaspérer par ses effets faciles habituels : "et
mes bites, tu les as vu mes bites !", "et mon absence de morale, tu l'as vu mon
absence de morale", "et mon homophobie assumée, tu l'as vu mon homophobie
assumée, je suis pas politquement correct, moi, hein !", "et ma performance
d'acteur, tu l'as vu ma grosse performance d'acteur !" "et ma putain de mise en
scène de bourrin virtuose, tu l'as bien vu, dans ta gueule, hein, hein !".
Irréversible apparaît alors comme un film beurk mais très sophistiqué, une sorte
de série Z gore mise en scène par un disciple de Scorsese et de Lars Von Trier.
Et de Kubrick, référence lourdement appuyé par l'omniprésence d'une affiche de
2001 dans les dernières scènes.
Et ça marche.
Irréversible est incroyablement efficace. Un vrai film de cinéma, différent, qui
cherche, qui ose, qui en veut. Mais les griefs sont innombrables.
Essentiellement autour du propos, qui ne cesse d'enfoncer des portes grandes
ouvertes. "Le temps détruit tout" "Ah si j'avais su !" "Mais j'aurais pas dû
faire ça !" "Y a pas de méfaits, y a que des faits !" "Humain, trop humain !"
"La vie est violente" "Nous sommes tous des bourreaux et des victimes !". Gna
gna gna, gna gna gna. Irréversible est donc un film très juste, qui dit des
choses très vraies. Mais bon, Noé nous prend quand même un peu pour des idiots.
On sent le scénario prétexte, juste une excuse pour expérimenter et faire tout
ce qui lui passe par la tête (oui, je sais, c'est pas joli-joli ce qui lui passe
par la tête). Les "grands sujets" évoqués par le film se trouvent effacés par la
splendeur visuelle, la performance technique, le génie artistique. Irréversible
se retrouve alors comme une œuvre purement formelle, extrêmement réussie et
intéressante. Quand soudain, après en avoir fini avec les scènes "chocs", un
autre film commence. Un film d'acteur, du moins, d'un acteur, le toujours
brillant Albert Dupontel, qui vole la vedette à tout le monde et surtout, oui,
surtout, au metteur en scène. On oublie alors la performance visuelle au profit
de ce qui se passe vraiment à l'écran, au profit de l'histoire. C'est assez
bref, mais cela rend le film plus riche. Et enfin, dans les ultimes séquences du
film, Noé se dit qu'il faut faire pleurer Jeannette (si elle a réussi à tenir
jusque là, même si, comme je l'ai déjà dit, le film n'est pas si horrible). Et
soudain ça vire au mignon, et dans les dernières minutes, centrées sur Monica
Bellucci, Noé se lâche et tombe dans le larmoyant. C'est Titanic, c'est le
Soldat Ryan, c'est Breaking The Waves, c'est Dancer In The Dark. Et lorsque
surgit Beethoven, on se laisse conquérir, contre notre gré, peut-être, un peu.
Comme devant Titanic. On se sent ému. Sans doute pour évacuer la pression des
minutes précédentes. Et on est prêt à applaudir des deux mains, après la seule
scène diurne qui clôt le métrage sur une respiration à la Atom Egoyan. Lorsque
surgit l'un des panneaux que Noé affectionne : "le temps détruit tout". Un effet
de plus, un effet de trop, inutile et ridicule. Qui laisse sur un sentiment
mitigé.
Irréversible
aurait pu être un chef-d'œuvre. On sent le grand film derrière tous les trucs
qui le plombent. Et on ne peut que regretter des choix aussi grotesques que la
description d'une boîte homo caricaturale en diable qui prête surtout à sourire,
ou cette scène de viol qui hésite entre la réalité sordide et des détails quasi
comiques. Les scènes "chocs" n'aident pas le propos du film. Mais voilà, comme
je le disais, y a-t-il vraiment un propos dans ce film ? A part la satisfaction
des petites névroses de monsieur Noé ? Si l'artiste se définit par la culture de
ses perversions, Gaspar Noé est un génie. Tout autant que David Lynch. Mais
encore faut-il que cela soit intéressant pour le spectateur. Et, attention,
roulement de tambours, Irréversible est intéressant pour le spectateur. Alors ?
Alors malgré tout, oui, malgré tout, et Dieu sait que le film n'est pas
sympathique et parfois ridicule, Irréversible est une réussite.
En résumé : L'un des films français les plus
passionnants de ces dernières années. Naviguant entre le sublime et le
nullissime, Irréversible doit être vu, quitte à y a aller avec grande prudence.
Car au-delà des séquences immondes, il y a une fantastique œuvre de cinéma,
différente, d'une grande perfection, et d'une rare beauté. Si ce que veut nous
raconter Noé et la manière dont il le fait laissent perplexe, Irréversible
devient au final un film étrangement émouvant. Une oeuvre humaine, à la fois
dans le plus abject du terme, mais aussi dans le plus touchant. A voir, bien
sûr. |
From Hell
des frères Hughes
S'il est vrai
que Notre Dame de Paris a donné naissance au Bossu de Notre-Dame des studios
Disney, s'il est vrai que l'Odyssée a prêté sa trame à des tonnes de nanars de
toutes sortes, aujourd'hui c'est le plus grand Comics de l'histoire des Comics
qui sert de prétexte à un film embarrassant. Oui, ce From Hell cinématographique
est bien gênant. Si on le compare strictement au chef-d'œuvre d'Alan Moore,
disons-le tout de suite, ce film est un infâme nanar, une bouse, un machin. Si
on le prend à part du Comics, en essayant du mieux possible d'oublier
l'inoubliable, From Hell a ses qualités, essentiellement plastiques. Pour le
reste, ma foi, même en le dissociant de l'œuvre de Moore, cela ne vole pas très
haut. Heather Graham joue comme une poutre, la reconstitution historique est
ridicule dans son ensemble (Whitechapel vue par Hollywood, au secours !), le
scénario n'est qu'un vague thriller bourré de clichés (un comble ! un affront !
l'interdiction même de porter le même nom que le Comics). Si certains, comme
Johnny Depp ou Ian Holm, s'en sortent comme toujours avec les honneurs, le film
n'est pas bien brillant. Certes les frères Hughes sont de chouettes metteurs en
scène, pas très loin de la verve d'un Scorsese, mais ils filment n'importe quoi.
Dans le genre on préférera sans problème Gangs Of New York, finalement beaucoup
plus novateur et moins niais, c'est tout dire.
La déception
est immense et l'on comprend pourquoi Alan Moore n'a même pas voulu voir le
film. Lorsqu'on lit les interviews des frères Hughes, on saisit rapidement le
nœud du problème : ils n'ont rien compris au livre. Mais rien. Quand on les voit
dire que le passage sur l'architecture de Londres est lourd et ne sert pas
l'intrigue, on a envie de rire, ou plutôt de pleurer. On sent qu'ils se sont
bien amusés avec leur jolis décors, leurs jolis costumes et leurs jolies
lumières, on se dit même qu'ils ont voulu faire un film "méchant", voire un peu
surprenant. On se marre. Au final, ce From Hell est un aimable thriller, plutôt
au-dessus de la moyenne, ne serait-ce que pour son beau visuel. Mais il est
aussi un affront au nom de Alan Moore et je déconseille très fortement sa vision
à ceux qui n'ont pas lu le Comics. Problème : une fois qu'on a lu From Hell, on
n'a vraiment pas la moindre envie de voir plus de 10 minutes du film. J'ai
supporté le calvaire pendant deux heures, avec pourtant des a priori très
positifs (Depp, les frères Hughes, Moore, Trevor Jones, rien que du bon, il
semblait) et bien, ouf, très peu pour moi. Finalement, la Ligue des Gentlemen
Extraordinaires par Stephen Norrington, on est un peu moins pressé de la voir.
En résumé : le DVD est très beau, avec des bonus
hollywoodiens en diable (donc gadgets). Le film est très beau, hollywoodien en
diable. Aucun rapport, mais alors aucun, avec le From Hell de Alan Moore. Jugé
pour lui-même, ce From Hell sur pellicule navigue entre le joli comme un clip et
le ridicule achevé (Heather Graham se prend pour Cameron Diaz, mon Dieu, un
concours de têtes à claques !). Aussi dispensable que le Comics est vital. |
Battle Royale
de Kinji Fukasaku
Les termes
qui viennent immédiatement à l'esprit après la vision de Battle Royale sont :
"putain de chef-d'œuvre !" Ce qui n'est pas très convenable sur l'échelle de la
critique de qualité et de l'argumentation, mais qui a le mérite de retranscrire
fidèlement ce que l'on ressent à la vision du film. On nous avait promis avec
Battle Royale un film cynique, second degré, polémique, satirique. Si satire et
cynisme il y a bien, on n'a pas assez dit, ou alors on n'a rien compris, que
Battle Royale est un monument de premier degré. C'est avant tout et surtout une
série B qui dézingue, une montagne russe qui flingue, un monument de cinoche.
Osons tout de suite la comparaison, Battle Royale tient des plus grands
Carpenter. On a beaucoup parlé de Verhoeven et c'est vrai qu'il y a du Robocop
et du Starship Troopers dans Battle Royale, mais il n'y a pas du tout le même
cynisme. Kinji Fukasaku (le vieux sage très indigne) adore ses personnages et il
parvient à les rendre presque tous touchants voire franchement émouvants. Ils ne
sont pas du tout des têtes à claques chair à boucherie comme chez Verhoeven.
Non, il y a la même affection à l'égard des "héros" que dans les grands
"survivals" que sont New York 1997, They Live ou bien Assaut. Et pour revenir
encore une fois à McTiernan, Battle Royale flirte aussi avec Predator.
Tout cela
pour dire que nous tenons peut-être bien là la meilleure série B de ces
dernières années. Un monstre de bonheur qui allie tout ce que l'on aime dans le
genre. Des personnages caricaturaux mais auxquels on croit par miracle (le super
méchant du film, le "volontaire", est à ce niveau extraordinaire), une situation
délirante mais aux possibilités exploitées jusqu'à plus soif (le jeu qui
entraîne la mort, on est bien loin de Running Man et peut-être plus proche de On
Achève Bien les Chevaux), une ambiance crédible et surtout une succession sans
faille de scènes anthologiques. Car ce qui impressionne dans Battle Royale,
c'est le sens du rythme. Avouons-le, aussi réussi que soit Starship Troopers, il
y avait de gros passages à vide. Dans Battle Royale, il se passe toujours
quelque chose, bien sûr grâce à l'abondance de personnages, mais aussi grâce à
un débordement de péripéties jamais ridicules.
Et puis c'est
gore. Du vrai gore qui gicle. Du gore qui fait mal, mais pas trop. Pas du tout
du gore "beurk", mais pas non plus du gore en images de synthèse. Il y a
énormément de sang et de détails immondes dans Battle Royale, le film est
parfois à la limite de l'éprouvant, mais reste toujours enthousiasmant. Et on ne
peut pas crier à l'outrage face à cet étalage de meurtres atroces et de morts
cruelles, non, car Fukasaku, comme Carpenter et Verhoeven, nous raconte quelque
chose en même temps qu'il nous divertit. Il y a de la poésie dans Battle Royale,
de la philosophie et même de l'émotion. La mort y est présentée de mille et une
façons différentes, mais toujours dans son absurdité la plus crue. Le film
pourrait être insoutenable, il choisit miraculeusement de viser en premier le
divertissement et après, en rebond, la réflexion. Le résultat fait bondir
d'enthousiasme (ce que je n'ai pas pu m'empêcher de faire, bon, je n'étais pas
dans une salle de cinéma, ne vous inquiétez pas).
Pour en
revenir à ce que je disais un peu plus haut, l'une des grandes forces de Battle
Royale, c'est sa capacité à enchaîner les scènes anthologiques et les images
marquantes. Du gunfight entre écolières au combat à l'arme blanche, du suicide à
la traîtrise, le film passe en revue tous les moyens imaginables de passer
l'arme à gauche et de nuire à ses petits camarades. Cela pourrait être une
énième série Z bourrine, c'est un moment de cinéma littéralement formidable, de
la graine de film culte. |
Piège de Cristal
de John McTiernan
Le cinéma est
un art. Sans aucun doute. Le cinéma peut donc faire passer des messages, faire
réfléchir, changer le monde. Mais le cinéma est aussi un divertissement. Le
cinéma peut nous aider à voir la vie en rose, en bleu, en vert, de toutes les
couleurs. Et dans cette acceptation du 7e art, il est évident, mais alors
tellement évident que c'en est indécent, que Piège de Cristal de John McTiernan
est l'un des meilleurs films de tous les temps. Et cela ne souffre aucune
objection. Quand j'avais 12 ans, que j'avais déjà vu pas mal de films, mais bon,
que j'étais encore un pré-ado un peu idiot, je considérais Piège de Cristal
comme un œuvre immense, sublime, fantastique, au même titre que 2001 ou que Le
Parrain. Maintenant que je suis nettement plus vieux et que je succombe plus
difficilement à l'enthousiasme béat de l'enfance, je peux vous affirmer
exactement la même chose. Si mon avis a changé sur le cas d'innombrables films,
pour Piège de Cristal, cela n'a pas bougé d'un millimètre, au contraire. Avec le
recul des années, avec les dizaines (oui, oui, dizaines !) de visions, avec
toute la "sagesse" que j'ai pu emmagasiner, Piège de Cristal n'est pas seulement
encore aujourd'hui l'un de mes films favoris, mais je peux monter à tous les
créneaux pour vous dire qu'au même titre que Stalker, que l'Aurore, que Ed Wood
ou que La Nuit du Chasseur, ce chef-d'oeuvre est l'un des plus essentiels à
l'histoire du 7e art. Rien que ça, ni plus, ni moins. Et je ne suis pas prêt
d'en démordre.
Car Piège de
Cristal est l'idéal du film "cool". Cool dans le sens sympathique, jouissif,
incroyablement apte à être vu, revu, appris par cœur. Mais aussi cool dans le
sens de couler comme de l'eau claire. C'est le McTiernan le plus aérien, le plus
virtuose. Et même si le presque aussi formidable Die Hard 3 (Une Journée En
Enfer) se pose là dans la maestria de mise en scène, ce premier opus est un
hallucinant ballet d'une légèreté visuelle, d'un souffle des mouvements, d'une
féerie du montage, d'une mélodie de la gestion de l'espace, qui laisse rêveur à
chaque vision. Parfait Piège de Cristal ? Sans le moindre doute. Oui, car le
scénario construit un thriller captivant comme les meilleurs Hitchcock (c'est un
peu la Mort Aux Trousses en huis-clos, oui, je sais, c'est bizarre, mais c'est
exactement ça). Et les scènes (toutes anthologiques, au sens le plus noble du
terme) s'enchaînent, comme les répliques, avec la même grâce que les mouvements
d'appareil. Ca fuse, ça explose, ça saute dans tous les coins, mais tout coule
de source. C'est divin.
Il faut
ajouter à cela un casting improbable à l'époque, mais qui paraît aujourd'hui
d'une évidence renversante. Bruce Willis est déjà un grand acteur, bien des
années avant la reconnaissance que lui ont apporté d'autres chefs-d'oeuvre tels
que l'Armée des 12 Singes, Pulp Fiction ou bien encore Incassable (une filmo
classieuse, ma foi, mais on passera sous silence une bonne flopée de nanars).
Alan Rickman donne naissance à une carrière sublime de méchant jouissif, c'est
peu dire qu'il est extraordinaire. Et tout le reste du casting les suit dans la
performance. Tous les personnages sont crédibles, même dans les pires poses
caricaturales. Mais Piège de Cristal, c'est surtout le chef-d'oeuvre du cinéma
en mouvement, de l'image animée, de l'action. Alors, oui, il y a aussi le A
Toute Epreuve de John Woo, certes, et McTiernan connaît déjà son petit Woo par
cœur lorsqu'il tourne Die Hard. Mais il apporte une vraie vision, une vraie
personnalité, un vrai talent déjà à l'œuvre dans le tout aussi sublime Predator.
Oui, je sais, je ne suis pas le premier à raconter tout cela, tout le monde vous
dira que Piège de Cristal c'est génial. Et c'est vrai. Par contre nous sommes
déjà un peu moins nombreux à vous dire que le 13e Guerrier c'est absolument
fabuleux, donc, là, tenez, j'en profite pour vous le répéter. Le DVD ? Et
bien c'est une édition collector avec un chouette nombre de bonus, plus ou moins
gadgets, mais franchement, je vais vous le dire simplement : bonus ou pas bonus,
du moment que l'image et le son sont au top (ce qui est le cas) : il est
indispensable, voire proprement vital, de posséder Piège de Cristal dans sa
DVDthèque. Vous pouvez aussi vous offrir Le Dictateur et le Mépris, mais bon
sang de bois, Die Hard c'est aussi important. Et si vous croyez que j'abuse,
vous avez tout intérêt à revoir sans le moindre a priori ce sommet indépassé. |
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