Raging Bull
de Martin Scorsese
Alors comme ça il paraît que cette édition spéciale double DVD est à boycotter ?
Et pourquoi donc ? Parce qu'il n'y a pas de transfert 16/9, si je ne m'abuse. Ce
que ça change pour les gens qui, comme moi, ont une bonne vieille TV 4/3 stéréo
et pis vala ? Rien du tout. Il paraît aussi que les bonus ne sont pas au top.
Bah voyons. Rien que le livret vaut largement l'investissement. Et il y a un
documentaire, pas mal fichu du tout, d'une petite demi-heure. Et je ne le dirais
jamais assez, les bonus on s'en fout. L'image est superbe, le son est parfait,
tout est impeccable, c'est indispensable.
Car nous parlons là de Raging Bull. Martin Scorsese, comme la majorité des
génies du 7e Art, est capable du meilleur comme du pire. Parfois on se demande
ce qui lui passe par la tête et trop souvent ses films sont intéressants mais
inachevés. Par contre, quand le monsieur touche au chef-d'œuvre, on s'incline
jusqu'au sol, car de Taxi Driver au Temps de l'Innocence en passant par les
Affranchis et Casino, ses réussites sont des sommets inestimables. Et Raging
Bull serait l'Everest de sa carrière. Un film d'une telle intensité, d'une telle
intelligence, d'une telle force, d'une telle beauté plastique, d'une telle
humanité, qu'il peut littéralement hanter le spectateur pendant des années et
des années. Si ce n'est changer sa vie pour toujours. Considéré par certains
comme le meilleur film américain des années 80, Raging Bull n'a pas pris la
moindre ride et aurait pu être tourné hier ou il y a 40 ans. Je ne vais pas
m'étendre sur la création du monument, l'édition collector s'en charge fort bien
à ma place. Et comme tout le monde l'a acheté (ou va l'acheter), il n'y a pas
grand chose à ajouter. Raging Bull est une montagne de cristal, un raz-de-marée
fragile qui ne cesse de nous mettre des pains dans la gueule pour mieux nous
faire chialer comme des gosses aussitôt après. Le film possède de surcroît un
travail tout simplement hallucinant sur le montage et le son. Sans parler du
thème musical emprunté à Mascagni, qui est l'une des plus belles utilisations du
classique au cinéma, à égalité avec les œuvres de Kubrick et de Boorman. Les
cinq dernières minutes du métrage sont aussi réputées pour faire partie des
moments les plus bouleversants de l'histoire du 7e Art. C'est toujours vrai,
plus que jamais. Scorsese n'a jamais aussi bien conté son éternel récit mythique
de progression vers la gloire, de déchéance et de Rédemption. La citation
biblique finale est tout simplement inoubliable et marquera à vie tous les cœurs
sensibles. Un chef-d'œuvre émotionnel jamais niais, souvent brutal et cruel,
réaliste et exemplaire.
En résumé : L'un des plus grands films de Scorsese (en attendant la sortie
du Temps de l'Innocence, son autre chef-d'œuvre absolu, à la fin du mois de
septembre), avec un De Niro légendaire (son meilleur rôle à égalité avec The
Deer Hunter et Il Etait Une Fois En Amérique), dans une édition collector
superbe. L'un des meilleurs films de l'histoire du cinéma, tout le monde le dit,
mais c'est vrai. Essentiel, vraiment essentiel. |
Princess Bride
de Rob Reiner
L'un des plus beaux films du monde de l'univers de tous les temps de partout,
nous revient enfin dans une édition digne d'éloges. Avec la collection Kubrick
et les collectors de In The Mood For Love, Les Vestiges du Jour et du Temps de
l'Innocence, c'est bien là l'événement DVDesque de la rentrée. Le DVD propose
(enfin !) le film en format respecté (Widescreen, compatible 16/9, toutes ces
sortes de choses), en 5.1, avec des sous-titres français. Et bien sûr toute une
ribambelle de bonus. Tout n'est pas transcendant, mais tout est en rapport avec
The Princess Bride, et tout ce qui a un rapport de près ou de loin avec The
Princess Bride est sacré et inestimable. Un documentaire tout frais, tout neuf,
fait office de plat de résistance, deux commentaires audio (Rob Reiner et le
scénariste William Goldman) s'avèrent gargantuesques, des petits bouts de making
of d'époque tourné façon DV (alors que cela n'existait pas encore, loin de là)
par Cary Elwes, et plein d'autres gâteries style bandes annonces et featurettes.
Bon bah voilà, ça c'était pour l'aspect purement formel du DVD.
Le film ? Plus puissant que le Prozac, plus intense que toutes les religions,
plus profond que toutes les philosophies, l'une des rares tentatives réussies de
contes de feu le 20e siècle. Une certaine idée du film parfait, et oui. Une
œuvre qui maîtrise aussi bien le 1er que le 36e degré, qui utilise toutes les
formes d'humours mais aussi d'émotions. D'un instant à l'autre on passe des
Monty Python à Edward Aux Mains d'Argent. Et puis surtout il y a cette
simplicité, ce plaisir total décomplexé, cette bonhomie de tous les instants,
dès la première vision Princess Bride fait partie de la famille, c'est un ami
cher, un compagnon de tous les instants. Les instants tristes, les instants
joyeux, les instants de solitude, les instants tendres, Princess Bride est
présent, toujours, intemporel, indémodable, indispensable.
Qualifié par beaucoup comme étant "le film le plus "citable" de l'histoire du
cinéma", Princess Bride ne décevra pas ceux qui vont le découvrir grâce à cette
édition spéciale. Chaque scène et surtout chaque réplique est instantanément
culte. Du "prepaaare to dieeee" aux R.O.U.S.s en passant par le sublime "as you
wish", Princess Bride est le film le plus vivant du monde, car il est le plus
proche, le plus directement présent à notre souvenir, le plus cher à notre cœur.
Et c'est bien sa simplicité, sa grâce qui font tout le charme (au sens fort) de
ce chef-d'œuvre. Chef-d'œuvre Princess Bride ?? Le terme est tellement
disproportionné, pompeux, gênant pour un film qui n'affiche aucune prétention, à
part celle de nous offrir une heure et demi de bonheur. Et c'est cette
décontraction qui lui donne sa folle liberté. Car Princess Bride est le film le
plus libre qui soit. Qui passe du rire aux larmes, de la parodie à l'essence des
contes, de la tendresse à la distance, du gag à l'émerveillement (voire les deux
en même temps). Le temps file mais Princess Bride ne vieillit pas, et nous non
plus, lorsque la si belle musique de Mark Knopfler revient à nos oreilles.
En résumé : le film le plus
simplement et tendrement magique de l'histoire du cinéma ressort dans une
édition spéciale exceptionnelle. Inutile de préciser qu'elle fait immédiatement
partie de la dizaine de DVD à posséder absolument dans sa collection. Un trésor. |
Massacre à la Tronçonneuse
de Tobe Hooper
Hérésie ! Hérésie ! Après l'abominable nouvelle version de l'Exorciste, un autre
(j'allais dire "l'autre") grand classique choc du début des années 70
fantastiques se fait massacrer. Vous allez me dire que ça tombe bien, mais oui,
mais non... Quel est le problème de cette luxueuse édition ? Le principal
provient de l'image. Nettoyée, vernie, remasterisée luxueusement, elle est bien
trop polie pour être honnête. Oui, on ne cesse de se plaindre des
remasterisations foireuses de certains films (Warner suivez mon regard), et là
on a tout pour être aux anges. Bah non, malheureux ! Le chef-d'œuvre de Tobe
Hooper sans son grain bien crado, sans ses craquelures, ses rayures, ses
couleurs bizarres, ce n'est plus le même film. Au niveau du son, il y a une
bonne et une mauvaise nouvelles. La bonne c'est la piste VO d'origine, parfaite.
La mauvaise, très mauvaise, c'est la piste VF entièrement refaite. Et là c'est
pas glop du tout. Si comme moi vous avez été élevé dans l'admiration de
l'édition bien glauque chez René Château Vidéos, alors vous allez pleurer toutes
les larmes de votre corps. L'épastrouillante VF surréaliste a disparu, au profit
d'une version clean, ce qui est aussi paradoxal que le lavage bouillant qu'a
subi l'image. Alors l'intérêt de ce DVD par rapport à la VHS ? Et bien ce sont
(pour une fois) les bonus. Une interview bien sympa de Hooper, des scènes
coupées et surtout des commentaires audio bien poilants.
Le film ? Je l'ai dit plus haut, ce n'est pas une surprise surprenante, c'est
toujours le même chef-d'œuvre absolu. Mon conseil étant de le revoir à peu près
tous les 5 ans, de ne surtout pas en abuser, pour retrouver à chaque fois
intactes les émotions d'origine. Même si la première vision de Massacre à la
Tronçonneuse est l'une des expériences les plus fortes d'une vie de cinéphile et
qu'elle reste à jamais inégalable, y revenir régulièrement est salvateur. Ce
film est l'étalon du "cinéma hystérique". Un coup de poing à l'estomac, c'est le
cas de le dire. La dernière demie-heure ne vieillira jamais, dans son mélange
incroyable de cartoon, de terreur pure, de cruauté inimaginable, d'implicite
insoutenable et d'humour jouissif ("Tu n'es qu'un crétin, tu as abîmé la porte
!" "Frappe grand-père ! Frappe !"). Rarement film culte et fauché aura aussi
bien supporté le poids des ans. Massacre à la Tronçonneuse, à l'inverse du
grand-père, ne prend pas une ride, et on se demande même s'il ne rajeunit pas
avec le nouveau millénaire.
En résumé : On a galvaudé
l'expression, mais voilà bel et bien un film UNIQUE dans l'histoire du cinéma. A
posséder absolument dans n'importe quelle version, car le seul chef-d'œuvre de
Tobe Hooper (qui est mort depuis, enfin presque...) est aussi l'un des films les
plus intenses qui soient. |
Gladiator
de Ridley Scott
Edition collector ultra luxueuse, qui incarne à la perfection tout l'esprit du
film, rarement support aura été autant en adéquation avec l'œuvre. On veut vous
impressionner par la débauche de moyens, on veut vous noyer sous le contenant,
on vous manipule avec le contenu. Et vous en voulez encore, encore et encore
plus. Comme pour Titanic ou pour Danse Avec Les Loups, vous pouvez rester sur le
quai, jouer la carte du cynisme froid ou du bon goût à tout épreuve. Dommage,
car vous passerez à côté d'un DVD jouissif au possible. Tout y est beau comme
une crèche. L'image est magnifique, le son est monstrueux, c'est bien
sous-titré. Niveau bonus c'est l'apocalypse, maintenant tout de suite. Et dans
l'ensemble c'est très instructif et pas du tout ennuyeux.
Le film ? Un grand film raté. Un film moyen alors ? Un film frustrant oui !
Clippé (et non mis en scène) à l'ancienne, Gladiator aurait pu être aussi réussi
que Titanic, pour sûr. Malheureusement, il manque trop souvent la petite
étincelle qui fait que l'on marche à fond dans le spectacle sans la moindre
arrière-pensée. A vouloir ménager tous les publics, Ridley Scott ne pousse
finalement aucune de ses ambitions jusqu'au bout. Pas assez spectaculaire, pas
assez tragique, pas assez lyrique, pas assez historique, pas assez
philosophique, pas assez fun. Gladiator fait du moyen-moyen à tout niveau. Et
c'est dommage. Voilà, c'est tout simple. Une moitié de métrage est ratée,
ennuyeuse, lourde, redondante, bourrée de clichés qui pèsent sur le cœur et
l'esprit. L'autre moitié est une incontestable réussite hollywoodienne pleine de
panache. On sauvera donc la première scène de bataille, quelques séquences
intimistes avec Marc-Aurèle (Richard Harris, qui se hisse à la hauteur du Alec
Guiness de La Chute de l'Empire Romain), toutes les scènes dans le Colisée (les
deux premiers combats sont admirables) et quelques bribes de grand cinéma ici ou
là.
Cette schizophrénie de Gladiator est parfaitement incarnée par ses deux
interprètes principaux. Joaquim Phoenix, en méchant bizarre et timbré en fait
des tonnes, au risque de sonner faux la majeure partie du temps. On se croirait
dans les Week End de Néron par moments. En antithèse parfaite, il y a l'immense
(oui, j'ai bien dit, immense) Russell Crowe, qui à lui seul porte et sauve le
film. En un mot comme en cent, je suis heureux d'avoir Gladiator dans ma
DVDthèque juste pour lui. Il nous offre l'une des meilleures performances
d'acteur dans un film hollywoodien de ces dernières années. Il vole toutes les
scènes, tous les plans, il réussit à nous émouvoir avec trois fois rien, son
charisme détruit tout sur son passage. Un Oscar est venu, pour une fois, très
logiquement récompenser ce tour de force qui marque le spectateur. Une telle
prestation parvient-elle à effacer les imperfections dantesques de Gladiator ?
Presque... Et c'est là que ça cloche. Car quand le générique de fin arrive, que
la jolie musique de Hans Zimmer (malheureusement très loin du niveau de son
chef-d'œuvre absolu pour la Ligne Rouge) monte dans les enceintes, on reste sur
notre faim, à ne pas trop savoir si on aime ou si on déteste le film.
En résumé : Une chose est sûre, on aurait vraiment aimé adorer Gladiator. Et
pleurer comme des midinettes au final, mais non, on restera devant la porte,
sans pouvoir la pousser. Mais on ne sera pas seul, on restera avec l'image d'un
Russell Crowe flamboyant, auprès duquel le Colisée en images de synthèse paraît
minuscule. Juste pour cela, pour le triomphe de l'acteur face au blockbuster, de
l'homme face au poids du monde, Gladiator est peut-être un grand film. |
Warriors
de Peter Kosminsky
Les Editions Montparnasse nous "offrent" ce fameux téléfilm luxueux dans une
édition irréprochable, du moins en ce qui concerne le rendu de l'œuvre. Pour les
bonus, c'est le minimum, mais on n'est vraiment pas là pour le plaisir de toute
façon. Un téléfilm BBC, c'est déjà un gage de grande qualité. Un téléfilm BBC
sur la guerre de Bosnie, on sait que cela ne va pas plaisanter. Avec comme point
de repère le Deer Hunter de Cimino, nous voilà plongé dans trois heures de
métrage étouffantes. La première heure reste dans le domaine du "film social à
l'anglaise", on peut s'y ennuyer poliment, mais on sait que cela ne va pas durer
et que ces présentations sont indispensables à la force de l'œuvre. Et les deux
heures suivantes confirment cet état de faits avec une force insoutenable. On ne
peut pas aimer Warriors. Récit tragique de l'impuissance face à l'horreur
humaine, trop humaine, Warriors entraîne ses protagonistes au bord de la folie
et de la mort (si ce n'est au-delà). Si toute la partie en Bosnie est un long
crescendo dans l'atrocité, l'épilogue du retour en Angleterre est carrément
éprouvant. Physiquement éprouvant, je préfère vous prévenir. Ici, pas de
démonstration gore façon le Soldat Ryan, mais une violence hors-champ, doublée
d'une souffrance intérieure palpable. C'est insoutenable et difficile à regarder
sans pauses. On sort du film malade. On peut se poser la question de l'intérêt
d'une telle œuvre. Oui, on sait que la guerre c'est ignoble, oui, on sait qu'en
ex-Yougoslavie il s'est passé des choses honteuses et que l'on n'a pas bougé le
petit doigt, oui, nous sommes tous coupables, oui, nous sommes tous humains.
Est-ce donc du masochisme de regarder Warriors ? Sans aucun doute. C'est une
expérience extrême, une auto-flagellation complaisante. Mais cette "compassion"
ne donne pas bonne conscience, bien au contraire.
En résumé : On sort de Warriors avec une mauvaise conscience exacerbée, on
ressent que partout dans le monde, à chaque instant, l'horreur est omniprésente
et qu'elle ne disparaîtra jamais. Dépressifs s'abstenir, personnes sensibles
passez votre chemin.. Mon conseil : enchaîner avec SOS Fantômes et/ou Pitch
Black. |
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