texte rédigé avant la vision du film
Depuis fin novembre 1999 et donc depuis la sortie américaine du film, je suis en possession de sa bande originale. Ayant plus que largement eu le temps de l'écouter jusqu'au 9 février 2000, j'en profite pour en faire une petite chronique "a priori". Cela a son intérêt car mon premier contact avec la musique de Sleepy Hollow fut placé sous le signe de la déception. Comme vous allez l'entendre (ou l'avez déjà entendu), la partition de Elfman est principalement celle d'un grand film d'action épique, c'est la débauche orchestrale qui prime et cette débauche signifie deux choses : une approche plus difficile que celle des mélodies habituelles (en fait les mélodies sont bien là, mais moins évidentes) et une richesse à toute épreuve. Effectivement, la bande originale de Sleepy Hollow est d'une richesse qui fait peur, d'une magnificence délicieuse, d'une beauté souvent sublime. Associée aux images, il ne fait aucun doute que cette musique va marquer les esprits.
68 minutes, Elfman ne nous en avait pas tant offert depuis Batman Returns (un signe ?). 68 minutes de magie pure, de concentré de génie à chaque note (une musique d'une grande exigence, donc). 68 minutes où l'on passe de la violence des batailles, à l'effroi de la forêt, de la sorcellerie des souvenirs, à la douceur du coin du feu, de l'angoisse des poursuites, à l'émerveillement du Fantastique. 68 minutes formidables qui ne sont pas prêtes de livrer tous leurs secrets.
Introduction : dès les premières mesures on ne peut être que bouleversé. Une lente montée orchestrale, quelques chœurs graves et mystérieux et en fond le thème du film. C'est mystérieux, effrayant, impressionnant. Mais on touche définitivement au sublime avec le retour du Boys Choird cher à Elfman. Le même qui transcendait Edward et Batman Returns. Sleepy Hollow est un film Fantastique, c'est évident. Le thème, souvent employé, mais jamais par les mêmes instruments, se glisse dans les méandres d'une partition orchestrale d'une richesse inépuisable. Quand la musique s'affole (pour la poursuite d'ouverture), impossible de faire la liste de tous les instruments qui entrent en piste. Une chose est sûre, si les chœurs étaient l'épicentre de l'émotion de la BO d'Edward, ils sont ici la clef de l'effroi, de la magie, de la sorcellerie du film. Ils offrent à la musique un "souffle" qui fait s'envoler le moindre instant vers des sommets d'un rare lyrisme. L'adéquation parfaite entre magie blanche et magie noire, en quelque sorte. La musique de Sleepy Hollow possède une personnalité fascinante et omniprésente, nul doute qu'il en sera de même pour le film.
Main Titles : pauvre de moi, le film n'est pas encore sorti que je connais déjà la musique du générique par cœur. Mais cela ne devrait pas poser de très graves problèmes pour apprécier le film, si j'en juge par le fait que pour Batman Returns je connaissais aussi la musique sur le bout des doigts avant la première séance. Que dire de ce générique ? Qu'il est sublime et tout et tout ? Certes, mais cela ne va pas nous avancer beaucoup. Ecoutez bien les détails, écoutez bien chaque variations. Ecoutez la profondeur de chaque atmosphères, écoutez la légèreté de tous les instruments, écoutez les chœurs si fins et si présents, écoutez le thème principal qui n'est jamais utilisé deux fois de la même manière, écoutez ces violons d'une cruelle beauté, écoutez cette trompette solo enfin utilisé à la perfection dans une BO de Elfman, écoutez cette puissance si foisonnante, écoutez cette écriture (oui, écoutez l'écriture de Elfman) qui renvoie toute la concurrence dans les oubliettes. Ah ça, c'est autre chose que du James Horner. Ici, pas la moindre routine, pas le moindre effet à la mode. La musique colle aux images et réussit pourtant miraculeusement à vivre aussi pleinement sans le film. On comprend mieux pourquoi cette BO ne se laisse pas apprivoiser en quelques écoutes, cette musique est aussi magnifique qu'exigeante. Mais une fois que l'on est ensorcelé, c'est définitif, c'est beau à en pleurer et on n'ose imaginer ce que va donner le film qui l'accompagne.
Young Ichabod : des chœurs, des chœurs, un petite minute et des poussières de chœurs enfantins, beaux comme ceux d'Edward mais avec une tension sourde à base de chœurs adultes menaçants. Le thème principal est omniprésent, il est sublime.
The Story... : Le cavalier Hessian à l'époque où il avait encore toute sa tête. On annonce ce flash back comme dantesque (d'ailleurs c'est un dessin représentant cette scène qui fut la première image de Sleepy Hollow disponible sur le web), et la musique n'est rien moins que... dantesque. Christopher Walken et ses dents taillées en pointe vont traumatiser bon nombre de spectateurs. Il suffit d'entendre la lente montée de l'effroi au cœur du morceau. La menace est là, la menace est déjà surnaturelle, le cavalier Hessian est démoniaque et cela s'entend. C'est grandiose, efficace, toujours aussi incroyablement riche et nuancé, mélodique et puissant, avec une musique comme cela on ne peut que réussir son film.
Masbath's Terrible Death : le cavalier sans tête frappe, et il ne fait pas dans la demie mesure. Le thème principal s'abat sur l'auditeur comme un coup de hache.
Sweet Dreams : Ichabod Crane rêve de sa mère. De nouveau, des chœurs tout en douceur, une féerie légèrement dissonante, une musique en forme de sortilège.
A Gift : passage intimiste, romantique, effroyablement beau, avec l'apparition d'un nouveau thème aérien et délicat. Du Elfman en pleine maîtrise de l'ensemble de l'orchestre, du Elfman a son sommet, améliorant ici des pistes déjà empruntées à la fin de Mars Attacks, mais sans oublier de cligner de l'oeil vers le Nightmare.
Into The Woods / The Witch : peut-être le plus grand moment du disque. Le début du morceau est une parfaite musique de film d'épouvante gothique. Mais alors, ces chœurs ! Ecoutez-moi ces chœurs ! Inédits dans le monde elfmanien, ils sont à la fois féeriques et effrayants. Nul doute que cette forêt soit hantée. On entend d'ici les voix des Dames Blanches. Du mystère et encore du mystère, de l'atmosphère luxueuse. Jusqu'à l'incroyable conclusion du morceau avec des violons déjantés et diaboliques, qui sautillent comme des démons sous la pleine lune.
More Dreams : de nouveaux, quelques rêves de l'enfance d'Ichabod. Toujours ces chœurs, plus froids, plus tristes, l'ambiance des rêves changent peu à peu, mais il ne fait aucun doute que ces scènes (avec Lisa Marie) vont entrer par la grande porte dans l'Histoire du Cinéma. Le drame se joue, peu à peu et la musique le décrit à merveille, avant même les images.
The Tree Of Death : voyage sur le chemin des morts, échos de Batman Returns pour une très longue pièce narrative où l'action le dispute au mystère. Elfman ne recule pas devant les effets "bouh fais moi peur !" dont l'efficacité n'est plus à prouver. Indéniablement, tout cela rappelle Batman Returns, et on ne s'en plaindra pas ! Il se passe de grandes choses auprès de cet arbre maléfique (qui est aussi important que le cavalier, il ne faut pas l'oublier...). Des choses horribles et palpitantes, comme l'exprime si bien les méandres de cette musique intarissable. Ne sont-ce pas là des chœurs légers et insouciants ? Une accalmie illusoire avant l'apocalypse, une explosion orchestrale une nouvelle fois digne du second Batman. Et Elfman enchaîne, toujours avec une musique qui colle aux images sans pour autant oublier d'être mélodique et fascinante à écouter seule (et ce, avant même d'avoir vu le film). Violons démoniaques, faux répits, chœurs menaçants, orchestre tonitruant, martèlements terrifiants, mais que demander de plus ?
Bad Dream / Tender Moment : Ultime flash-back sur l'enfance d'Ichabod Crane, nous sommes en plein drame, en plein traumatisme. Le thème principal du film apparaît dans toute sa terrifiante puissance. Orgue, chœurs, montée orchestrale, Elfman sort le grand jeu. Et l'émotion n'est jamais très loin. Le thème principal est omniprésent mais toujours sous mille et une variations. Fichtre, que c'est beau...
Evil Eye : Angoisse, sorcellerie et mystère sont au programme. Entre les instants effrayants (et il y en avait !) de Beetlejuice et des échos scintillants du Nightmare ainsi qu'une étrange réminiscence du thème de Catwoman (sorcière ? Où ça sorcière ?), Evil Eye est peut-être le morceau le plus classiquement elfmanien de cette BO. Encore une fois, il faut guetter les apparitions du thème principal, toujours différentes. Et toujours ce "love theme" de toute beauté...
The Church Battle : Accrochez-vous, la fin de Sleepy Hollow promet d'être plus qu'épique. Première démonstration avec le siège de l'église. Elfman est devenu en un clin d'oeil un génie de la musique de films d'action. Ca part dans tous les sens mais cela ne se perd jamais, c'est puissant sans être abrutissant, c'est toujours un plaisir pur à écouter. Il n'y a JAMAIS deux fois la même mesure, cette musique n'est jamais deux fois la même ! Grandiose, en particulier avec l'apparition finale, terriblement torturée, du thème principal
Love Lost : On enchaîne directement avec les premières mesures sublimes de ce Love Lost, plein de chœurs edwardiens et de douceur elfmanienne. Pour une fois la mélodie est des plus évidentes, ah oui, c'est magnifique, c'est émouvant et tout et tout. Et toujours le thème principal énoncé avec originalité. Mais l'accalmie fut de courte durée, déjà l'action reprend ses droits. Tous les instruments s'en mêlent, ici des violons, là des voix, ici une trompette, là des contrebasses...
The Windmill : gigantesque séquence d'action dans le moulin. Elfman annonce la couleur dès l'ouverture, on ne va pas faire dans la demie-mesure. Vous allez trembler, vous allez vous accrocher à votre fauteuil, bref vous allez en avoir pour votre argent (et sans doute beaucoup plus). Le cavalier sans tête tend mille et une embuscades comme tout bon croque-mitaine qui se respecte, il est là, il n'est plus là, quelques chœurs enfantins ensorcellent le suspens, le piège se referme. Le thème principal résonne au loin avant de revenir au premier plan pour accompagner une débauche orchestrale totalement clouante. Elfman nous refait dans le moulin ce qu'il nous avait fait dans la cathédrale de Batman... en mieux. La dernière minute est apocalyptique, l'action s'affole de plus en plus pour pouvoir enchaîner à toute vitesse sur la poursuite finale.
The Chase : pas le temps de se reposer, c'est une poursuite et la déferlante de violons le montre aussi bien que les images. Si Burton filme ses scènes d'action avec autant de maestria que Elfman les met en musique, Sleepy Hollow risque bien d'entrer dans la légende (et pas seulement pour les fans de Burton). Plus le morceau avance plus on tombe dans un pur délire orchestral d'une richesse extraordinaire.
The Final Confrontation : comme d'habitude (ou presque) dans la collaboration Elfman/Burton, il y a un morceau "final confrontation". On poursuit la tempête sonore de The Chase. Toujours plus grandiose, en digne successeur des délires des Batman. Jusqu'à la résolution finale que l'on imagine sublime. On pense à Batman Returns et cela fait rudement plaisir. On pense aussi que Sleepy Hollow est un film unique en son genre et cela fait encore plus plaisir.
A New Day ! : Inutile de cacher que tout est bien qui finit bien (en apparence). Une petite minute de pause gracieuse après toute la violence des morceaux précédents. On pense à Mars Attacks !, un peu, mais pas longtemps... Indéniablement, Elfman s'est surpassé, une fois de plus, en signant peut-être sa meilleure BO depuis The Nightmare, et sûrement la meilleure depuis Mars Attacks !
End Credits : variations sur le Main Titles, sublimissimes. Surtout ne partez pas avant la fin du générique ! Le thème principal à base de chœurs enfantins, une trompette bouleversante, une musique qui est prête à entrer dans l'Histoire, tout comme le film... Et le final, un quasi hommage à... Edward Scissorhands ! On ne sait pas encore pour le film, mais pour ce qui est de sa musique, c'est une merveille.