Bonjour à toutes et à tous. Nous revoilà dans le top albums. Un peu miraculeusement, un an de plus, un an de moins, s'est écoulé sans nous emporter, sans m'emporter, dans les cyberlimbes. Rien de mieux pour célébrer cela qu'une sélection musicale oscillant entre joie éperdue et ténèbres infinies. Il y a de la colère, de la rage, dans les meilleurs disques de 2023 et il y a aussi un bonheur total, extatique. Le plaisir est tellement nécessaire, qu'il est au cœur de pas moins de trois albums du top 5.
Vous allez me dire que c'est une sélection sacrément sado-maso, vous n'aurez pas forcément tort et ce n'est pas volontaire. C'est un constat, une fois la liste achevée. Un coup ça fait mal, un coup ça fait du bien. Non, non, attendez, même quand ça fait mal, ça fait du bien. La violence de certains albums, leur noirceur et leur révolte, semblent de plus en plus vitales. On est déjà assez anesthésié comme ça, bien souvent totalement impuissant, de plus en plus impuissant. Laissez-nous au moins cet exutoire. Le plaisir et la colère, tous les deux à la source de fantasmes plus ou moins avouables. Puissent les artistes encore longtemps nous permettre de les exprimer, de les ressentir, par le biais de leurs œuvres.
Cela n'a pas été facile, tant l'année musicale fut merveilleuse, mais j'ai essayé d'être sobre sur le nombre de disques sélectionnés. "Seulement" 80. Pourquoi 80 et pas 50 ? Ou 75 ? Ou 100 ? Ou 20 ? Parce que. Un nombre raisonnable qui m'a permis de rédiger un peu plus et d'être un peu en avance sur le calendrier. On ne dirait pas, mais ça prend du temps. Quand vous lisez les classements des autres publications, n'oubliez pas qu'ils sont généralement nombreux à les rédiger et pas tout seul, bénévolement et pendant leur maigre temps libre. Après, je me justifie, mais personne ne m'a jamais vraiment reproché de ne pas en faire assez. Je me culpabilise bien tout seul, pas besoin d'aide pour ça.
Je ne mets pas directement les extraits musicaux sur cette page, seulement des liens. C'est peut-être moi et mon ordinateur vieillissant (il a seulement 10 ans, pourtant) et ma connexion internet provinciale (la fibre ? C'est quoi ça la fibre ?), mais les temps de chargement des pages remplies de lecteurs audio ou de vidéos intégrées, ça fige tout, ça freeze, ça plante. Donc je pense à vous, l'Internationale des prolétaires de l'informatique. Pour la technique, on va faire sobre aussi.
Que cela ne vous empêche pas de cliquer sur tout, sans a priori. Ne jamais se dire : "oh ça ce n'est pas pour moi, ce n'est pas mon genre". La curiosité, l'ouverture d'esprit, la joie de découvrir, même à 45 ans (ou plus, ou moins), que, finalement, on aime un style musical à côté duquel on était toujours passé. C'est valable pour tout en ce monde, d'ailleurs. Oui, ce n'est pas toujours agréable de sortir sans cesse de sa zone de confort. Et ce n'est pas non plus la peine d'insister, parfois, quand on n'aime pas, on n'aime pas. Ce sera peut-être pour une autre fois, ou pas. J'espère donc que vous ferez quelques découvertes agréables ci-dessous. Que vous serez heureux de retrouver des artistes que vous aimez déjà. Que, dans tous les cas, vous prendrez du plaisir, on est là pour ça.
80
L'indie pop à guitares, c'est rassurant, c'est confortable, même quand les textes abordent des thèmes peu joyeux. Là, on est dans la veine de Real State, c'est-à-dire qu'on se promène au milieu de mélodies sucrées et de petites guitares bienveillantes. Oui, c'est confortable, mais il y a plein de moments dans la journée où cela fait du bien d'entendre des guitares bienveillantes.
79
Un album pour les nostalgiques des années 80. Enfin, un certain son des années 80. Celui de la synthpop et de la new wave. Vous aimez New Order, Depeche Mode, les Pet Shop Boys, The Human League, vous allez être dingues du dernier album de Nation of Language. Strange Disciple fait revivre une époque avec des chansons ravissantes qui, sans cacher leurs influences, ne versent jamais dans le simple pastiche.
78
Musicalement, on est en territoire connu, c'est de la pop fourre-tout rigolote. Le propos n'est pas léger par contre, le marteau est bien là pour taper sur les travers de l'humanité. Yaeji est très en colère, mais vous ne le devinerez probablement jamais sans vous pencher sur les textes, la musique est trop primesautière. Joli grand écart, donc, parfaitement exécuté.
77
Celui-là s'adresse à toutes celles et tous ceux qui aiment leur rock féminin à l'ancienne, bien direct, sans fioritures inutiles. La guitare, la basse, la batterie, la voix qui met des claques. C'est classique, mais interprété avec le maximum d'efficacité et soutenu par des chansons de haute volée.
76
Cet album est un peu difficile à juger avec si peu de recul. Il rappelle, en bien des points, la sortie de White Chalk qui avait désarçonné un peu tout le monde. Avec le recul, on est à peu près tous d'accord pour dire que White Chalk est un des meilleurs albums de PJ Harvey. C'est moins évident avec I Inside the Old Year Dying, car l'effet de surprise du disque "fantomatique" n'est plus là. On sait déjà que la chanteuse sait ciseler ces atmosphères hantées. C'est un album austère, porteur de malaise et de mauvais présages. C'est d'une grande beauté aussi, évidemment.
75
Du post-punk irlandais pour compenser l'absence de The Twilight Sad cette année. OK, eux, ils sont écossais, mais ce n'est pas seulement pour l'accent à couper au couteau que je fais la comparaison. Musicalement, c'est vraiment proche. Avec des atmosphères lourdes qui alternent moments de calmes et soudaines explosions cathartiques. C'est intense.
74
D'une productivité devenue proverbiale, le musicien français qui se cache sous le patronyme d'Esoctrilihum a carrément sorti un triple (!!) album en 2023. Deux disques avec des morceaux oscillant entre 6 et 9 minutes et un troisième avec deux pistes de plus de 20 minutes. C'est... beaucoup. C'est un périple, pour sûr. Tout le monde n'aura pas la capacité d'attention pour tout écouter à la suite, ce n'est probablement pas fait pour de toute façon. Chaque disque se suffit aisément à lui-même pour s'immerger dans ce maelstrom qui parcourt gaillardement toute l'histoire du black métal, de Bathory à nos jours. L'aspect le plus symphonique du genre est omniprésent, avec plein de synthés. Le troisième disque est particulièrement généreux à ce niveau et ravira les nostalgiques des années 90.
73
Avec son septième album, Mitski offre ce qui est probablement le disque le plus accessible de sa carrière. Oui, l'écriture est plus classique, plus apaisée, avec des arrangements plus sobres. Mais il reste des surprises et des pièges, sans parler des textes, voguant toujours dans les océans de l'humour le plus noir. C'est un disque de solitude, aussi, dont l'apparent dépouillement sert la force du propos.
72
Double album de death metal atmosphérique pour ses spécialistes de l'épouvante musicale. Leur patronyme annonce la couleur, il y a ici une obsession pour l'œuvre de Lovecraft. Vous allez me dire, rien de plus banal dans le monde du métal. C'est presque pire que dans l'univers du jeu de rôle, y a du Lovecraft partout, à toutes les sauces. L'overdose est inévitable et seules les œuvres vraiment exceptionnelles surnage au milieu des milliers d'adorateurs de Cthulhu. C'est le cas ici, car Ulthar a de l'ambition à revendre. Sur Helionomicon, ce sont deux morceaux de 20 minutes chacun qui plongent l'auditeur dans les fameuses horreurs indescriptibles. On n'est pas dans la radicalité disonnante de Portal ou d'Altarage, mais il y a de quoi avoir le tournis quand-même. Une telle générosité dans l'ignominie sonore ne peut que forcer le respect.
71
Le pop-rock indé à l'ancienne de Ratboys titillera la fibre nostalgique de ceux qui ont grandi dans les années 90. Vous aimez les Breeders, Hole et Liz Phair, et bien les musiciens de Ratboys, ils ont l'air de bien aimer aussi. D'aimer beaucoup, même, tant on reconnaît ici les influences de groupes majeurs de la pop à grosses guitares. Franchement, ça n'invente rien, mais il y a de sacrés refrains.
70
La chanteuse rendue célèbre par le groupe The XX fait de la house en solo. C'est de la musique de club à écouter chez soi (ou en club, mais comme on n'y va pas, on imagine). Il y a une tonne de mélodies imparables ici et une voix vraiment magnifique qui semble plus libre que jamais.
69
Du DOOOOOOOM ! Pardon, je m'emporte, mais dans le genre doom à l'ancienne, on n'a pas fait mieux cette année. On a fait plus original, plus progressif, du doom mélangé avec plein de choses différentes, comme chez Dream Unending, Tribunal ou Vanishing Kids. Cela ne veut pas dire que la musique de Godthrymm n'est pas démentielle en elle-même, au contraire. Le doom traditionnel c'est le métal originel, on le rappelle, car, après tout, que jouait Black Sabbath ? Là, avec la production aux petits oignons et les compositions aux proportions épiques, c'est la crème de la crème du genre.
68
Ah ça, pour un come-back, c'est un come-back. Disparue après le génial The Chronicles of Marnia (sorti il y a tout juste dix ans et très apprécié par votre serviteur), Marnie Stern revient sans rien avoir perdu de son énergie époustouflante. Vous connaissez peut-être son style, c'est du "shredding". Elle joue de la guitare vite, très vite, très très vite, plus vite que la lumière. C'est... frénétique. Les morceaux sont courts, heureusement sans doute, on en sort lessivé. C'est probablement de la drogue sonore, sans les effets secondaires de la drogue. D'utilité publique, donc.
67
Depuis l'époque où elle faisait partie du groupe Espers, Meg Baird crée une folk exigeante et atmosphérique. Pour son cinquième album solo, la musicienne poursuit son exploration du genre avec des compositions d'une sophistication extrême. Qu'on écoute Furling en fond sonore ou avec une attention soutenue, cette musique s'apprécie tout autant.
66
Je préfère sans doute yeule quand elles brodent de l'ambient pop comme sur Serotonin II, mais il faut avouer que leur évolution musicale a du panache. C'est devenu de la noise pop parsemée de l'électro glitch qui était au coeur de l'album précédent (le bien nommé Glitch Princess). Les larsens de guitares s'invitent donc copieusement dans Softscars, perforant les mélodies sucrées. Le mélange n'est pas nouveau, mais la production ultra-moderne lui permet de se réinscrire pleinement dans l'époque. yeule jouent autant de la confrontation que de la séduction, continuant leur portrait tout en nuances d'un malaise existentiel qui parlera certainement à plus d'une génération.
65
Brigid Mae Power, c'est d'abord une voix, une manière de chanter qui rappelle un peu, en plus classique, celle de Cate Le Bon. On revient donc auprès de son nouvel album car on a un coup de cœur pour la voix. Ensuite, on s'installe dans des chansons folk rock sensibles, subtiles, gracieuses.
64
Anohni retrouve le groupe the Johnsons pour la première fois depuis Swanlights, sorti en 2010. Après un album solo et un Ep très portés sur l'électronique, c'est aussi le retour des ambiances soul, jazz et pop des premiers albums de l'artiste. Mais depuis cette époque Anohni a encore affuté son écriture, en particulier au niveau des textes. La puissance politique est toujours présente, le discours toujours aussi cinglant et émouvant.
63
On va vous dire que c'est de la folk psychédélique, voire de la folk gothique. Tout est relatif, c'est loin d'être aussi gothique que Lankum, hein. Ce n'est pas effrayant, au contraire, cette musique est rassurante, belle à tomber par terre. Les arrangements sont précis et enveloppant, avec une production lyrique qui met en valeur des mélodies sublimes.
62
Le premier volet de ce double Ep était déjà présent dans mon classement de l'an dernier. Je répète donc ici brièvement que le groupe australien est, depuis le début des années 2000, le meilleur groupe de funeral doom de la planète. Leur œuvre est rare et précieuse. Ces deux Ep sont plus longs que bien des albums (40 minutes chacun, pas moins). Six morceaux en tout, pour ce qui forme un double album qui ne révolutionne en rien le genre, certes, mais qui nous l'offre toujours à son sommet.
61
Toujours aussi énergiques, les musiciennes de Dream Wife offre avec Social Lubrication un troisième album encore plus réussi que les précédents. Certes, une fois encore, la deuxième moitié est un peu inférieure au début sur les chapeaux de roue. Mais les tubes sont monumentaux.
60
Ah, nouveau disque de SPELLLING et il n'est pas dans le top 10 ou carrément n°1 comme The Turning Wheel (toujours le meilleur album des années 2020, so far, je rappelle) ? Non, car ce n'est pas vraiment un "nouvel" album. Chrystia Cabral réenregistre ici des chansons remontant du début de sa carrière, jusqu'à quatre titres de The Turning Wheel. A l'origine, il y a l'envie de jouer avec son œuvre, de profiter d'un groupe complet et de davantage de moyens techniques. Sur certains morceaux, ce sont les versions live qui sont interprétées. Cela donne une relecture dantesque de Under The Sun (probablement la chanson qui profite le plus de cette rénovation) ou un solo de guitare à se damner à la fin de Boys at School. Tous les morceaux ne surpassent pas forcément les versions originales (en particulier lorsqu'il s'agit de ceux de The Turning Wheel, déjà parfaits), mais ils ont le mérite d'apporter des nuances, des détails en plus, des visions délicatement étranges. En tant que pause entre deux albums, le disque demeure incontournable car il s'agit là d'une des artistes les plus talentueuses de l'époque.
59
Le premier album de l'Irlandaise Ciara Mary-Alice Thompson (Cmat, donc), sorti l'année dernière, était un rafraîchissant mélange de country, de folk et de pop, revues et corrigées par une personnalité iconoclaste. Sur ce deuxième disque, Cmat met de côté la country et lorgne davantage sur une pop plus classique, mais toujours avec cette verve mordante. Il y a plein de tubes là-dedans.
58
Le groupe de black métal expérimental poursuit ses grandioses aventures avec un album monstre et 1h20 de fourre-tout musical. Dès le deuxième morceau, tout est jeté en vrac aux oreilles de l'auditeur : du néo-classique, des blast beats, de l'électro, des hurlements de damnés, des choeurs angéliques, du glitch... Tout cela, oui, et de préférence en même temps. C'est assez délirant. De loin, c'est une cacophonie indescriptible. Une écoute attentive révèle une richesse folle, une vraie grâce et surtout une inventivité folle. Seul problème, c'est tellement dense (et strident) que c'est rapidement épuisant et donc à écouter avec modération.
57
Quel beau parcours que celui de Jason Isbell, du rockeur au bord de l'abîme au (déjà) vieux sage incarnant les aspects les plus progressistes d'un genre traditionnellement bien réac (la country US). Et tout cela sans rien perdre de la créativité musicale qui était déjà remarquable lors de son passage chez Drive-by Truckers. Les albums solos (ou avec the 400 Unit) de Jason Isbell sont tous très recommandables (en particulier Southeastern et Ruins). Weathervanes est un excellent ajout à cette discographie.
56
Il faut comprendre les membres de Slowdive. Quand on n'a plus rien à prouver, on peut se laisser vivre. Après avoir largement contribué à définir les contours d'au moins deux genres majeurs (shoegaze et dream pop) dans les années 90, s'être éclipsé au sommet et avoir signé un come back parfait (l'album de 2017, un chef-d'œuvre), que reste-t-il à faire ? Juste se faire plaisir et faire plaisir à son public, sans doute. Everything is alive ne cherche pas à changer quoi que ce soit à l'identité de Slowdive, c'est un nouveau chapitre sans fausse note. Il n'y a pas de révolution ici, juste un nouveau recueil de chansons de Slowdive, la perfection de plusieurs genres musicaux.
55
Avec leur pop extrêmement dense, le trio des Young Fathers s'est imposé comme un des groupes majeurs de la scène britannique. C'est une musique faussement accessible, gorgée de ténèbres et de colères. On y croise mille et une influences et, de ce grand fourre-tout, les musiciens tirent d'improbables tubes.
54
C'est dans un paysage sonore apocalyptique que s'avance le mélange de doom, de sludge et de black métal du duo Ragana. Après 11 ans d'une carrière souvent éloignée des projecteurs médiatiques, le groupe a enfin bénéficié des louanges de la critique, bien au-delà des cercles d'amateurs de métal underground. C'est plus que mérité, tant on est ici dans l'approche la plus accessible du métal extrême. Les mélodies simples et la mélancolie de Desolation's Flower parleront à tous ceux qui ont un peu d'affinité pour le spleen évoqué avec des grosses guitares et un chant déchirant. Les textes sont d'une poésie aussi sobre qu'évocatrice, ils participent à l'émotion de l'album.
53
C'est l'album d'électro à l'ancienne de 2023. Une joyeuse auberge espagnole d'un peu tout ce qu'on peut faire avec des machines qui rêvent. Techno, ambient, house, electronica, IDM, psychédélisme, nommez cela comme vous le voulez. Le titre donne une bonne idée de ce à quoi vous pouvez vous attendre. C'est un voyage sonore interstellaire, d'une ambition revigorante.
52
C'est le groupe star de 2023. Le supergroupe, comme on dit. Julien Baker, Phoebe Bridgers, Lucy Dacus, si vous ne connaissez pas déjà, au moins un peu, leurs œuvres en solo, c'est que vous ne vous êtes pas du tout intéressé au rock indépendant de ces dernières années. Il y a cinq ans, les trois amies se sont trouvées suffisamment d'affinités, personnelles et artistiques, pour se lancer dans une aventure qui leur réussit en tout point. Même si Phoebe Bridgers avait cartonné avec son dernier disque (Punisher), le premier album de boygenius est devenu le plus grand succès public et critique des trois musiciennes. Il faut dire qu'il y a ici tout ce qu'on peut aimer dans le genre, avec une variété notable dans les styles, sans pour autant que les différences soient trop intrusives. Très attachant.
51
Oui, je sais, la sortie de cet album a été largement ternie par les propos postés par la chanteuse en approbation d'un réactionnaire notoire. La regrettable "excuse" qui s'en est suivie n'a fait que mettre de l'huile sur le feu. Je ne vais pas m'étendre sur le sujet (à part qu'on emmerde les TERFs, bien sûr) et je ne vais même pas vous faire un speech maladroit sur la séparation entre la femme et l'artiste. Car Hit Parade est tout autant un album de Roisin Murphy que de DJ Koze. Et en tant qu'album de DJ Koze, feat. Roisin Murphy, c'est une grande réussite. Musicalement, c'est du caviar, avec des idées partout et une multitude de détails qui invitent sans cesse à revenir. C'est, peut-être, le meilleur album de la carrière solo de Roisin Murphy, on ne va pas se mentir (je préfère quand-même le précédent, Roisin Machine, mais ça se discute). Donc, bon, tant que l'artiste ne devient pas une militante réactionnaire, qu'elle ne caviarde pas son œuvre de messages moches, je ne renie pas mon affection pour sa musique, trop "coocool" pour être résistée.
50
A la fois très présente médiatiquement et rare quand il s'agit de sortir de nouvelles chansons, Sophie Ellis-Bextor semble mener une double vie. D'un côté la personnalité publique ultra attachante qui a sauvé le monde pendant le confinement (le Kitchen Disco qui justifie à lui seul les mesures drastiques face à la pandémie). De l'autre la musicienne dont les récentes productions pop s'avèrent plus sombres, aussi bien thématiquement que musicalement. Oh, elle n'est pas (encore) gothique Sophie, loin de là, mais on sent que derrière l'éternel sourire et la famille nombreuse heureuse, il y a une part de ténèbres. Et surtout, on demeure surpris, et ravi, par la qualité des récents albums. Sans être aussi bon que Familia (n°3 de ce top en 2016, je ne regrette rien), HANA réserve encore une multitude de chansons magnifiques.
49
Cela fait longtemps que Meghan Remy donnait l'impression de pouvoir sortir un album de disco. C'est quasi chose faite avec Bless This Mess, où les rythmes du genre sont encore plus présents que d'habitude. Evidemment, cela ne va pas être non plus du Kylie Minogue, hein. La synthpop et le disco chez U.S. Girls, c'est plein de circonvolutions et de chausse-trappes. Mais les mélodies n'ont peut-être jamais été aussi évidentes, la musique aussi pleine de groove. On peut danser sur Bless This Mess. Après, c'est Meghan Remy, alors si on se penche sur les textes, on va vite déchanter. C'est du disco existentiel.
48
Vous allez me dire : hardcore + reggae, je connais déjà, Bad Brains le faisait il y a 40 ans. Certes, mais avec Zulu, on sent bien que quatre décennies d'évolutions musicales sont passées par là. Dès l'ouverture symphonique et ample, on n'est plus dans les années 80. Confirmation avec le son énorme des guitares qui débarquent, ce n'est pas de la production punk maigrelette, mais bien celle du métal le plus lourd. C'est le hardcore d'aujourd'hui, qui voisine avec le death métal sans ambigüité. Mais avec une boulimie sonore qui fait surgir de la soul 70's, du hip-hop, du funk ou du jazz vocal. Avec des morceaux dépassant rarement les deux minutes et en moins d'une demi-heure, Zulu essaie d'englober l'ensemble de la musique populaire black de la seconde moitié du XXe siècle.
47
Issu de la scission du groupe Nervosa, Crypta reprend, sur le papier, le même concept : quatre musiciennes brésiliennes font du death métal. Mais si Nervosa lorgne de plus en plus sur le thrash, Crypta s'attaque au death métal dans sa version la plus traditionnelle, la plus virtuose et la plus agressive. Il faut dire que, tout comme Nervosa, Crypta a toujours beaucoup à prouver auprès des (trop) nombreux puristes et autres "gate keepers". On n'est pas dans l'univers de la pop, où les girls bands, dans lesquels toutes les musiciennes/chanteuses ont des allures de mannequins, est une chose relativement bien acceptée (et encore). Dans le monde du métal, les jolies filles c'est bien pour décorer, mais musicalement ça ne sera jamais aussi bien que quand ce sont de gros tatoués chevelus qui font du bruit. Pour tordre le cou à ces clichés qui ont la peau dure, les musiciennes de Crypta sortent l'artillerie lourde. Ce second album, après un premier opus déjà remarquable, est encore plus réussi. Agréablement mélodique, parfaitement virtuose et vraiment très très méchant, Shades of Sorrow offre le meilleur du death métal old school actuel.
46
Après l'expérimental et monumental The Ascension, Sufjan Stevens revient ici à une approche plus classique de sa musique. On y retrouve à la fois ses tendances folk et son goût pour les arrangements électroniques grandiloquents. La synthèse est particulièrement réussie. C'est évidemment plus accessible que The Ascension, c'est aussi moins intéressant. Et il y a le contexte. Outre les problèmes de santé de l'artiste, c'est l'annonce du décès de son partenaire en avril dernier qui donne une dimension déchirante à des chansons déjà fort intenses. L'ombre plane toujours sur l'œuvre de Sufjan Stevens, on est presque gêné de prendre tant de plaisir à l'écouter essayer de transcender sa souffrance.
45
Avec L'Rain c'est la garantie de plonger dans un petit monde sonore bizarre, d'une étrangeté quasi totale. Rien que les titres des morceaux annoncent la couleur (I Hate My Best Friends, Oh Wow, a Bird!, New Year's UnResolution). Il y a de l'humour partout, même quand les sujets sont plus difficiles. Il y a surtout l'exploration musicale, assez indescriptible, qui n'atterrit presque jamais là où on l'attend.
44
En 1992, le premier album d'Iris DeMent, Infamous Angel, avait redéfini l'archétype du disque de country. Après ce classique absolu, la musicienne s'est faite de plus en plus rare. Workin' on a World est son premier album depuis 2015 et c'est, déjà, un nouveau classique du genre. Musicalement, tout est traditionnel, mais composé et interprété avec le même talent qu'il y a 30 ans. La perfection country, à écouter même si vous n'avez pas d'affinités particulières avec le genre.
43
La folk de Julie Byrne n'a jamais été d'une gaieté folle, mais avec ce concept album autour de la mort et du deuil, on est encore plus proche des ténèbres. Il ne faut pas se fier à l'apparente douceur de la voix et des compositions, c'est un disque difficile. On est loin d'être dans la dépression, hein, ce n'est pas non plus du Joy Division, il y a des tonnes de percées optimistes. Et si on n'écoute pas les textes, cela fait un accompagnement sonore délicat et agréable. Par contre, préparez les mouchoirs si vous vous penchez sur ce que nous raconte Julie Byrne.
42
Alors, oui, ce n'est pas le même choc que To See the Next Part of the Dream, le meilleur album de shoegaze de ces dernières années (et carrément 2e de ce classement en 2021). Le groupe coréen a ici choisi de partir sur une approche un peu plus pop, qui rappelle par endroit les meilleurs moments de M83. C'est moins bruitiste, un peu plus classique, mais il reste de grands moments épiques.
41
Est-ce que Lana Del Rey compose trop ? Je crois avoir déjà posé la question dans des classements précédents, tant la productivité de la chanteuse dépasse même celle de Taylor Swift (qui a surtout réenregistré des classiques cette année, tout en confortant sa place de star n°1 de la pop mondiale grâce à une tournée dantesque). Lana n'arrête pas et c'est tant mieux comme ça. Car oui, ses albums sont toujours bons, voire très bons. Elle a atteint un sommet avec NFR! (mais son meilleur reste Ultraviolence, je le maintiens) et ses disques suivants, tout en gardant plus ou moins la même formule, n'en demeurent pas moins très plaisants. Ici et là, elle essaie des petites choses, mais l'ensemble est familier, confortable, une forme de néo-classicisme pop, parfait pour notre époque.
40
En une décennie, les britanniques de Svalbard sont devenus des incontournables de la scène post-hardcore. Le côté le plus métal de la musique est ici mis en avant, on est souvent en plein blackgaze, surtout avec des textes quasi entièrement dédiés à la dépression et à l'anxiété. Ce n'est pas un disque léger, même s'il offre des scintillements de lumière, que ce soit dans les mélodies ou dans le chant. Ce chant, assuré par Serena Cherry et Liam Phelan, respire la souffrance. Heureusement, les guitares emmènent souvent vers les cieux. D'autres groupes font cela très bien aussi (pensez à Rolo Tomassi, si vous voulez une approche légèrement plus accessible), mais Svalbard vient de reprendre une longueur d'avance avec The Weight of the Mask.
39
Depuis son origine, l'hyperpop essaie d'avoir le beurre et l'argent du beurre. Etre à la fois un pastiche, voire une parodie, tout en conservant la sincérité. Les résultats ne sont pas toujours convaincants, tombant souvent dans un entre-deux aisément ridicule et/ou déplaisant. A force d'abuser d'ironie ou, au contraire, de surjouer la sincérité, à force d'abuser d'Autotune et de blip-blip, l'hyperpop se casse souvent la figure. A 32 ans, Hannah Diamond est déjà une ancienne du genre, même s'il ne s'agit là que de son deuxième album. Perfect Picture est une nouvelle réussite, un funambule pop qui tient en équilibre sur des refrains foufous.
38
Après leur chef-d'œuvre pop, After Laughter, Paramore s'est longuement absenté, laissant Hayley Williams profiter de sa carrière solo et de son influence sur toute une génération de jeunes chanteuses. Le trio est enfin de retour au sommet de son art. Un art fait de pop à guitares avec des textes anxieux. Une angoisse qui se dissimule moins derrière un habillages mélodique et qui revient un peu aux origines punk-pop du groupe.
37
Il faut attendre le troisième morceau du nouvel album de Tomb Mold pour se faire cueillir comme un débutant. Le death métal des deux premiers titres de The Enduring Spirit est d'un niveau stratosphérique, on est habitué avec ce groupe. Mais sur l'ouverture de Will of Whispers la guitare aérienne annonce un nouvel univers. Oui, l'essentiel de l'album adopte encore la forme habituelle du genre. Mais de nombreux passages s'envolent vers un rock progressif, descendant direct de Pink Floyd. Avec le chant guttural.
36
Au milieu de tous les albums imprévisibles et inclassables de 2023, celui-ci est peut-être le plus difficile à qualifier. D'une ambition virevoltante, Black Rainbow cherche à désarçonner l'auditeur d'un instant à l'autre. R'n'B suave ici, noise rock là, est-ce de la pop ? Du hardcore ? Du funk ? La chanteuse a commencé sa carrière dans un groupe de punk rock, tout s'explique. Ou pas. Le disque est vaste, fou, charmeur et mal poli, âpre et tendre, c'est un univers musical entier.
35
Le meilleur groupe de l'histoire du métal (tous les genres confondus) continue son parcours sans faute avec un 16e album aussi réussi que les précédents. Car c'est bien là la plus grande force d'Enslaved : il n'y a pas de mauvais album dans leur discographie. Même les disques les plus "classiquement" progressifs, comme In Times et RIITIIR, s'avèrent remarquables. Et je ne parle même pas des chefs-d'œuvre, nombreux, qui s'étalent du milieu des années 90 jusqu'à nos jours. Car Heimdal n'est pas loin d'égaler les meilleures albums des Norvégiens. Oui, c'est moins extrême que par le passé, c'est plus accessible pour des oreilles novices, ce n'est pas un reproche qu'on peut faire à des artistes qui dominent le monde du métal depuis plus de 30 ans.
34
Il suffit de regarder la pochette du deuxième album de Joanna Sternberg pour comprendre qu'il s'agit là très littéralement de "musique de chambre". D'un intimité totale, les chansons de l'artiste débordent autant de mélodies et de virtuosité que de textes évoquant des tourments extrêmement personnels et évidemment universels.
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Quelle carrière que celle de Yo La Tengo. Un groupe né en 1984 et qui aura mis presque une décennie à trouver sa voie (à partir de Painful en 1993). 30 ans plus tard, avec mille et une variations autour d'un son immédiatement reconnaissable, les musiciens continuent à sortir de grands disques. Le dernier en date est un de leurs meilleurs, synthèse parfaite de trois décades d'expérimentations. Du rock le plus noise, en passant par la pop la plus délicate et l'indie rock le plus raffiné, tout Yo La Tengo semble être contenu dans This Stupid World.
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Deux des groupes de métal les plus intéressants du moment s'unissent pour un album partagé (un "split", grande tradition dans le monde du métal). Loin d'être anecdotiques, ces splits ont souvent donné l'occasion à des artistes de se transcender. C'est le cas ici, où en l'espace d'une vingtaine de minutes chacun, Dream Unending et Worm jouent à leur plus haut niveau. Les premiers creusent leur sillon de death-doom rêveur, les seconds suivent la ligne de black métal progressif merveilleusement inaugurée avec Bluenothing, l'année dernière. Franchement, c'est une sorte de best of du métal traditionnel actuel. C'est varié, accessible, parsemé de moments de grâce.
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R'n'B, soul et pop sensuels, c'est l'alchimie attendue lorsqu'on s'aventure dans un nouvel album de Kali Uchis. Autant vous dire qu'on n'est pas déçu par Red Moon in Venus, plus lascif et voluptueux que jamais. Il y a des tubes et même un morceau final au dynamisme inattendu (Happy Now), mais l'album se déploie avant tout comme une douce rêverie. Comme d'autres cette année, la chanteuse a choisi de s'épanouir dans une vapeur sonore enveloppante, un nuage fantasque et fantasmatique.
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Celui-là est pour les amoureux des disques atmosphériques. Le groupe mêle shoegaze, doom, rock gothique et psychédélisme pour créer des cathédrales de ténèbres. D'accord, on ne vient pas pour y respirer la joie, il y a plein d'autres albums dans ce classement pour cela. On vient pour se laisser glisser dans les abysses. Mais il y a un côté lumineux, probablement à cause du chant élégiaque et des solos de guitare généreux, comme des phares au milieu de la tempête, comme des étoiles au cœur de la nuit noire.
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C'est le quintessenciel album de métal de 2023, sa plus parfaite image d'Epinal, de la pochette aux paroles en passant par la musique. C'est inclassable, car cela fait écho à un peu tous les genres du métal, du speed au heavy, du doom au black, Hellripper ne retient que le meilleur, le plus fun. Le résultat est un album percutant qui assume les aspects les plus caricaturaux de cet univers et qui se révèle extrêmement divertissant.
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Alors, c'est de prime abord de la publicité mensongère. Avec Sunny War, on annonce de la folk punk avec un titre promettant un gospel anar. Rien de tout cela au final. C'est du folk rock, très pop, super accessible, avec plein de chansons accrocheuses. Les textes sont souvent mordants, c'est le côté punk. Mais sinon c'est un des disques pop rock les plus abordables de 2023 (on se surprend à l'entendre en faisant ses courses au supermarché, c'est vous dire si on repassera pour le côté punk et anar). Mais alors, c'est pas bien ? Haro sur la social-traître ? Que nenni ! C'est excellent. Enfin, moi le folk rock de ce niveau, j'adore. Il y a même une sublime ballade toute fragile (Sweet Nothing) à la fin de l'album, que demander de plus ?
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Vivian Tylinska ne connaît aucune frontière musicale. Si l'ossature des cinq compositions de son nouvel album est clairement héritée du métal extrême, les méandres doivent davantage au jazz et à la musique classique contemporaine. Certains passages rappellent évidemment Liturgy, autre projet mené par une musicienne trans. Mais d'autres n'appartiennent qu'à Vivian, notamment lorsque la musique se fait plus pop, voire bondissante, comme sur la dernière partie de Madeline Becoming Judy, probablement la meilleure fusion existante entre synthpop rigolote et black métal. Varié et imprévisible, l'album passe du doom à la musique concrète, de l'ambient au rock indépendant. Vivian Tylinska joue par ailleurs de presque tous les instruments, même la batterie n'est pas programmée. Et je ne parle même pas de son look sexy en diable, hérité des 50s qui ajoute une touche de cool supplémentaire. Un des albums les plus passionnants de 2023.
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Le premier album de Miya Folick était déjà un coup de maître (directement à la 3e place de ce classement en 2018). Cinq ans d'attente plus tard, la chanteuse revient avec un disque moins ambitieux au niveau sonore, mais aussi remarquable au niveau des compositions. Il y a bien là quelques tubes qui devraient être reconnus par tout le monde (dans mon utopie). Tout est infiniment personnel et profondément universel, la marque de la pop conçue avec le plus grand des soins.
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En 2017, la folk-pop expérimentale de Susanne Sundfør avait atteint un niveau de grâce que j'ai rarement entendue. Sa Music for the People in Trouble était logiquement mon disque favori de l'année. En 2023, elle a repris à peu près la même formule pour un album moins surprenant et probablement un peu moins réussi, mais réservant encore de nombreux moments de beauté. Une beauté parfois cristalline (alyosha), parfois tourmentée (ṣānnu yārru lī) qui donne toujours le frisson.
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Un album de punk-pop comme seul Jeff Rosenstock sait les ouvrager. Un mélange de refrains et de mélodies énormes et de textes anxieux et révoltés. Ce n'est pas parce que sa frénésie sonore s'offre parfois des pauses que Jeff Rosenstock baisse les bras. Il a toujours la rage au ventre et le talent pour raconter des histoires inoubliables en quelques répliques. Si ce n'est pas son album le plus punk, ni le plus énervé, c'est le plus accessible et probablement le plus émouvant. La bande-son idéale pour exprimer sa colère, ses doutes, ses espoirs.
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A force d'épurer le R'n'B et l'électro, Kelela a fini par atteindre les rives de l'ambient avec ce nouvel album où les rythmes, très présents mais aussi très vaporeux, rappellent les grandes heures de l'ambient house du début des années 90. S'il n'y avait pas le chant, on ne serait pas si loin de certains morceaux de The Orb. Il y a des chansons, bien sûr, certaines sont même immédiatement accrocheuses, mais c'est clairement davantage un album concept qui joue sur l'atmosphère. Durant un peu plus d'une heure, on a l'impression de plonger dans une eau sombre et calme, comme le traduit si bien la pochette du disque. Apaisant et crépusculaire.
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La Péruvienne Sofia Kourtesis a offert le grand disque de 2023 pour danser intelligemment (dans les clubs, dans son salon, peu importe). Oui, c'est de la house, de la techno qui cogne, les rythmes ne font pas de prisonniers, mais le chant, les synthés aériens et les touches de folklore des Andes emportent l'auditeur très loin. L'album s'inscrit à la fois dans une tradition née dans les années 1980 et dans une modernité faite de thèmes intimes et de rythmes universels. Derrière l'exaltation du dancefloor, il y a des chants de revendications et la mort (de la mère) qui plane. Toujours, la joie et la vie reprennent le dessus. Transcendant.
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Figure incontournable de la country alternative, Margo Price enchaîne les albums exceptionnels depuis 2016. Son quatrième disque, Strays, n'entame en rien cette discographie parfaite et affirme encore les qualités de songwritter de l'artiste. Les perles s'enchaînent jusqu'au sommet Lydia, un récit héritier des plus beaux moments de la country américaine.
20
Année après année, le terrorisme musical de Cattle Decapitation semble devenir un peu plus la bande son idéale de l'époque. Certes, son nihilisme quasi absolu peut rebuter. L'humanité est abjecte, elle mérite de disparaître, le plus vite possible, mais quand-même dans les souffrances les plus cruelles auparavant. Évidemment, c'est cathartique. A écouter quand on a envie de tout foutre en l'air, quand on se sent totalement impuissant face aux catastrophes qui arrivent. A écouter quand on aimerait botter des derrières, tirer des oreilles, renverser des tables (pour rester raisonnable, tout peut passer pour des propos extrémistes aujourd'hui, il paraît). On laissera donc Cattle Decapitation exprimer notre colère mieux que nous avec cet inimitable maelstrom de grindcore et de death metal. Un mélange de l'épouvante rendu fort accessible grâce à une production titanesque et un sens mélodique indéniable.
19
Avec ce bref (à peine une demi heure) premier album, Victoria Monét approche d'une forme quintessentielle du R'n'B contemporain, fortement teinté de funk. Avec une majorité d'instruments traditionnels qui donnent une chaleur supplémentaire, ses compositions respirent la classe et le glamour, sans jamais tomber dans les travers du bling-bling. C'est sophistiqué, sans jamais tenir l'auditeur à distance. C'est la diva next door, le fantasme de proximité, en quelques sortes.
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Maîtres du death métal progressif actuel, les musiciens d'Horrendous élargissent encore leur horizon en ajoutant encore plus de heavy métal dans leur recette. Pour les puristes de la terreur sonore qui dégouline, ça pourra sembler trop propre, alors qu'il y a ici le bon esprit de la vieille école. L'album est très accessible, presque accueillant, un paradoxe pour le genre, mais aussi une manière d'essayer de nouvelles pistes en cherchant une forme de "monogenre" du métal. Cela ne peut pas plaire à tout le monde, évidemment, mais c'est aussi d'une générosité folle. Au-delà des expériences sonores, la clef de la réussite c'est bien sûr la qualité des compositions, jamais prises en défaut.
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La jeune chanteuse islandaise réussit là un tour de force en embrassant un son fort ancien, celui du jazz vocal le plus traditionnel, en le repeignant de teintes pop qui le rendent accessibles aux plus jeunes. D'un coup, la génération Tik Tok est amoureuse de l'ambiance des années 50 et de la nouvelle Julie London. Sauf que là, contrairement à la majorité des albums de ce style, la chanteuse compose aussi la quasi totalité des morceaux. Bien sûr, il y aura toujours des chantres de la pureté musicale qui viendront vous dire que c'est trop ceci ou pas assez cela et qu'un genre aussi codifié (et embourgeoisé) ne devrait pas être composé et interprété comme-ci ou comme-ça. Et que c'était mieux avant, il y a 70 ans. On les embête, hein ? Évidemment. C'est un disque magique.
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Un groupe qui se nomme Tribunal et qui a le son du Jugement Dernier. Un album qui se nomme le poids du souvenir et qui exhale la mélancolie et les regrets. On ne peut pas dire qu'on nous ment ici sur la marchandise. Pour un premier album, le duo formé par Soren Mourn et Etienne Finn a déjà tout de l'oeuvre définitive. Déjà, comme je le mentionnais plus haut, il y a le son, absolument gigantesque, écrasant, évocateur. C'est du doom gothique, qui cite My Dying Bride comme principale influence. Effectivement, on reconnaît là des aspects des vétérans du genre, mais que c'est magnifiquement réinterprété ! Avec une grande variété dans les rythmes et dans le chant, qui passe de la douceur ténébreuse au guttural effroyable. On ne s'ennuie donc jamais, surtout quand le violoncelle de Soren Mourn vient peupler les morceaux de ses volutes. Et si vous aimez les gros riffs et les solos de guitare qui emportent loin, il y en a plein aussi. Sorti en janvier dernier, The Weight of Remembrance a durablement résonné dans l'année musicale, et pas seulement dans le monde du métal. Car c'est un disque pour toutes celles et ceux qui aiment le lyrisme et l'élégie. C'est à la fois grandiose et très intime, une dévastation émotionnelle dans la pénombre.
15
Quand j'écoute la pop "expérimentale" portée aux nues par les critiques ces dernières années, même si j'apprécie certains albums, j'ai toujours l'impression qu'on a toujours au moins une décennie de retard sur The Knife et Fever Ray. Silent Shout sortirait en 2023, ce serait encore le disque le plus novateur (et probablement le meilleur) de l'année. On a reproché à Karin Dreijer de se reposer un peu sur ses lauriers avec Radical Romantics. D'une part, elle en a largement le droit après tout ce qu'elle a fait pour la musique du XXIe siècle. D'autre part, c'est tout simplement faux. Certes, la majorité des sonorités de l'album sont connues, mais on retrouve là toute l'œuvre de l'artiste, des débuts de The Knife jusqu'à Plunge. Et l'intensité n'a pas faibli d'un iota. Il suffit d'écouter des morceaux comme What They Call Us, Shiver, Carbon Dioxyde ou le revanchard Even It Out pour se souvenir que rien ne semble adoucir le mordant de Karin Dreijer. Personne ne parvient à être aussi étrange, aussi sans concession, tout en composant des morceaux pop accessibles. Cette musique ne devrait pas être aussi plaisante à écouter et pourtant, aussi radicale qu'elle se revendique, cela reste de la pop, celle qui devrait rythme tous les foyers de la planète.
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Dans ce classement on retrouve des vétérans de la musique pop ainsi que la relève. Parmi les nouvelles figures de la pop d'aujourd'hui, c'est Olivia Rodrigo qui a tiré son épingle du jeu cette année avec son deuxième album. Un disque de post-ado quasi parfait, avec de la pop à grosses guitares, des punchlines partout et même une ballade pièce-montée (vampire) qui rappelle que la musique d'aujourd'hui n'a rien à envier à celle des décennies précédentes. N'écoutez pas les vieux et jeunes imbéciles qui vous disent que "c'était mieux avant". Non, ça pouvait être très bien "avant", mais c'est aussi très bien maintenant. Les gamins d'aujourd'hui ont bien de la chance d'avoir des Olivia Rodrigo, des Laufey et des Rosalia. Et ceux qui ont "passé l'âge" peuvent aussi en profiter, tant qu'ils n'ont pas perdu leur faculté à apprécier la bonne musique, bien sûr.
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Il s'est fait attendre ce nouvel album de Trevor Powers sous le nom de Youth Lagoon, mais il n'y a pas à regretter tant le résultat tient du magique. C'est, pour moi, son disque le plus réussi depuis le tout premier, The Year of Hibernation. Là où ce premier disque respirait encore les tourments adolescents et son lot de malaises et de sensation d'isolement (l'artiste n'avait que 21 ans), Heaven is Junkyard apporte à l'univers sonore, immédiatement reconnaissable, le bilan de près de 35 années d'hypersensibilité. Il y a cette fragilité, cette impression que la voix, comme les chansons, sont toujours au bord de la fissure, de la disparition. Il y a cette mélancolie insondable, toujours contrebalancée par des mélodies magnifiques. La musique de Youth Lagoon est à la fois douloureuse et tellement réconfortante.
12
Plus de 30 ans après leur formation, presque 25 ans après la sortie de leur premier album, The Clientele se surpassent en offrant ce qui est probablement leur meilleur disque. Vu la tenue de leur discographie, ce n'est pas une petite gageure, c'est un coup de génie. Le rock indépendant du groupe a toujours eu un côté intemporel, il était déjà hors des modes il y a 20 ans. Sur cet album fleuve, les chansons parfaites côtoient des percées expérimentales qui relancent sans cesse l'attention de l'auditeur. Le côté un peu uniforme du son, qui pouvait gêner certains auditeurs, n'est plus de mise. C'est une réinvention, sans jamais rien perdre de l'identité qui rend le groupe si attachant.
11
Vétérans du métal expérimental, les Allemands de Dødheimsgard (ou DHG) prennent toujours soigneusement leur temps entre chaque album. On les attendait depuis 2015 et leur chef-d'oeuvre A Umbra Omega. Le nouveau disque reprend là où les musiciens s'étaient arrêtés, en peaufinant une recette écrite petit à petit depuis le début des années 2000. Du black métal d'origine, il reste des oripeaux et des fulgurances, mais systématiquement pulvérisés par un mélange des genres inclassable. Certes, d'autres groupes suivent à présent le chemin défriché par Dødheimsgard, ils sont loin d'être les seuls à faire du black atmosphérique bordélique. Mais il y a une patte unique, immédiatement reconnaissable. Sur ce disque, les transitions sont moins brutales, les tonalités s'épousent de façon plus fluide, l'écoute est, osons le dire, plus plaisante. Les moments d'accalmie et ceux d'immense beauté (le morceau final Requiem Aeternum, simplement sublime) sont nombreux. Ce n'est jamais banal, ne serait-ce que grâce au chant, toujours "autre". Oui, Dødheimsgard prend son temps, pour mieux revenir et rappeler pourquoi il s'agit toujours du plus grand groupe de métal expérimental de la planète.
10
En 15 ans de carrière et cinq albums, Lydia Loveless n'a cessé de peaufiner son style de country alternative, se teintant toujours davantage de rock indépendant. Son dernier album en date est probablement le meilleur. Une demi-heure à peine et 10 chansons idéales dans leur classicisme assumé. De l'humour, de la verve incise, des ambiances et des refrains ouvragés avec un talent de plus en plus remarquable, c'est parfait. Une artiste méconnue, surtout dans nos contrées, qui est néanmoins devenue incontournable.
9
Avec son univers panthéiste et sa musique entre folklore des contrées les plus sauvages des Etats-Unis et black métal atmosphérique, Austin Lunn s'est imposé en une quinzaine d'année comme l'un des artistes majeurs du métal contemporain. Le souffle de ses compositions emporte l'auditeur toujours plus loin, entre tempête de neige, survol de sommets gigantesques et effroi face au sublime de la nature. Sur The Rime of Memory, la mélancolie, ingrédient essentiel de la musique de Panopticon, n'a jamais été prégnante. La disparition et l'oubli rôdent. Lunn a imaginé l'album à la fois comme une allégorie de la catastrophe écologique en cours et comme une Odyssée vers l'acceptation du temps qui passe et de la mort qui approche. Oui, ce ne sont pas des thèmes très joyeux, mais il y a toujours le rayon de lumière qui transperce les ténèbres. Ne serait-ce que parce qu'il reste l'espoir que la nature sera toujours la plus forte, au final. L'album épique de 2023, de la grande "littérature" sonore.
8
La musique d'Amaarae est un mélange d'influences, principalement héritées de l'afrobeat et du R'n'B, qui pioche un peu partout dans le spectre mondial de la pop actuelle. Née dans le Bronx, mais partageant son enfance entre les USA et le Ghana, la chanteuse a fait le choix de retourner vivre en Afrique avant ses 25 ans. Avec son deuxième album, elle s'épanouit pleinement en tant qu'artiste queer qui parle sans détour du désir et de la sexualité et de leurs innombrables facettes. Les textes sont chauds bouillants. Avec son falsetto séduisant, Amaarae exalte et provoque, elle sait que ses récits tombent souvent sous le coup de la loi de son pays. La musique possède les mêmes atours sensuels. On est surtout surpris par la richesse des arrangements, l'éventail surprenant des genres abordés qui créent une forme de neo-world-music qui reprend le flambeau de M.I.A., sans en épouser ouvertement, pour l'instant, l'idéologie "no borders". Il y a quand-même une forme musicale utopique qui transparaît ici, refusant de s'inscrire dans une seule et même culture. C'est l'Internationale du plaisir, les hymnes des jouisseurs sans frontières.
7
Creeper a tout compris. Après des décennies de disques de rock sous toutes les formes et sous tous les oripeaux, après les origines, les revivals, les résurrections, et l'invention de millions de sous genres, la meilleure voie c'est celle de la grande conjonction, la synthèse, la dialectique. Et chez Creeper, la dialectique casse clairement des briques. Jouant à la fois sur le premier et le second degré, la musique de Creeper réussit ce que certains artistes (souvent détestés par la critique et adorés du public) ont peaufiné par le passé. Oui, il y a Meat Loaf ici, Queen, Sisters of Mercy, Judas Priest et tant d'autres. C'est ultra sérieux et totalement ridicule, sans jamais avoir honte de rien, ni des punchlines folles, ni des gros refrains. C'est théâtral, grandiloquent, toujours gigantesque, même, et surtout, sur les power ballads aussi naïves que sublimes (I will love you more than death!). En plus c'est un concept album sur les vampires, tant qu'à faire. C'est du rock'n'roll à écouter en secouant la tête et avec deux doigts en l'air pour imiter les cornes de Satan. C'est la quintessence du genre, sa perfection actuelle. Tout autant que l'album précédent, rien ne s'approche de Sanguivore, de très loin le meilleur disque de rock à l'ancienne de 2023.
6
C'est un idéal d'album de "singer-songwritter". Le disque intimement personnel, où le texte surclasse la musique, sans que celle-ci ne soit pour autant une arrière-pensée. Kara Jackson est d'abord une poète, primée et reconnue. A seulement 23 ans, elle a déjà une carrière et une existence qui lui donne des allures "d'âme ancienne". Sur son premier album, elle chante le deuil, l'amour, les regrets, les espoirs, avec la maturité des auteurs au crépuscule de leur vie. Pas de refrain, juste des épiphanies inoubliables et un décor sonore entre sophistication et simplicité. Kara Jackson cite aussi bien Neil Young, Brandy et Nina Simone parmi ses influences. Mais on entend aussi la folk complexe et fleuve qui coule dans la grande tradition qui va de Bob Dylan à Leonard Cohen, en passant par Joni Mitchell et Joanna Newsom. Accessible à la première écoute, la musique se révèle bien vite exigeante, source de désorientation plutôt que de confort. Elle est à l'image des textes qui expriment la tristesse, le mal-être, le doute, la colère au fil de répliques déchirantes. Un album qui vous transperce le coeur.
5
De l'électro industrielle, menaçante, crépusculaire. Des rythmes pour danser, mais déchirés par la bruit et la fureur. La musique dessine un ciel apocalyptique, une dystopie gothique, un décor à la Blade Runner ou à la Akira, avec une bande son de body horror cybernétique. Le chant déclamé, hurlé ou murmuré en français réjouit avec des textes anarcho-punk bien gauchistes (un compliment pour moi, vous le savez). Féminisme virulent, rage face aux bruits des bottes, rêve de révolution progressiste, c'est de l'électro hardcore ""woke"" qui veut te tirer de ta torpeur. Le présent inquiète, l'avenir terrifie, il reste l'art pour essayer de transcender les catastrophes à venir. La meilleure musique politique de 2023.
4
Évidemment que c'est la plus grande joie musicale de l'année : à 55 ans, Kylie Minogue revient au sommet des tops avec son meilleur album. La seule artiste féminine à avoir un album n°1 (en Angleterre) dans cinq décennies différentes est plus que jamais entrée dans la légende. Outre le single phénomène (Padam Padam), Tension ne contient que des tubes et une énergie qui en remontre à des chanteuses 30 ans plus jeunes. Même la pseudo ballade You Still Get Me High se transforme en bombe au bout d'une minute. Un seul défaut, mais en est-ce vraiment un ? Comme le single, l'album semble un peu trop court (malgré de très honnêtes 42 minutes au compteur). Il vaut mieux laisser l'auditeur en réclamer davantage que s'ennuyer, sans doute. A noter que, comme pour l'album précédent, le très sous-estimé DISCO, le "problème" est résolu avec la sortie d'une version "extended", moins de six mois plus tard. Un coup commercial avant tout, pour faire acheter deux fois quasiment le même disque. C'est aussi un "bonus" tout aussi appréciable que beaucoup de versions longues de classiques du cinéma. Tension résume à la fois 30 ans d'histoire de la pop et toute la carrière de Kylie. C'est le fameux "chef-d'œuvre tardif" et, on l'espère, loin d'être le dernier.
3
Hum, la folk gothique... La musique quasi moyenâgeuse qui semble surgir de l'inconscient populaire de l'Humanité. Immémoriale, horrifique et rassurante, confortable et créatrice d'un malaise indicible, la musique de Lankum est l'héritière de bien des générations. Il y a ici des sonorités qui rappellent des temps où nous n'existions pas encore. Des rites et des légendes dansent de manière grotesque entre les flammes des morceaux. Ce n'est pas une écoute facile, on est ici dans l'héritage de Comus et de Richard Dawson. Mais avec une touche de modernité propre au groupe, qui flirte plus d'une fois avec le drone ou le doom. Qu'on ne s'y trompe pas, Falsum Lankum regorge aussi de moments de beauté enveloppante, apaisante et délicate. Il y a des ballades, reprises du folklore irlandais, qui rassurent et réconfortent. Malgré son côté ancestral, cet album ne sent jamais la poussière et ne cesse de défier l'auditeur. Et ce, jusqu'aux dernières minutes de The Turn, une apocalypse sonore qui met à l'amende bien des disques de noise et autres provocateurs sonores. Un album intemporel, un voyage aux confins de notre mémoire.
2
Depuis la fin de Chairlift, on sentait que Caroline Polachek pouvait offrir un album de ce niveau. Pang était une belle répétition, mais il lui manquait encore une bonne dose d'ambition et de diversité. Tout se met en place avec Desire qui concrétise l'évolution de la chanteuse. Inspirée par les plus grands noms féminins de la pop (de Kate Bush à Bjork, en passant par Enya), elle parvient à se construire une identité propre, un style unique. A la fois dans l'air du temps et discutant avec 40 ans de synthpop, le disque enchaîne les tubes avec une fausse désinvolture. Et puis il y a cette sensualité étrange, elle aussi héritée des grandes défricheuses de la pop et du R'n'B alternatifs. L'album ne cesse de revendiquer son titre évocateur, d'affirmer son érotisme subtil et sa poésie sensuelle. Une merveille.
1
C'était donc cet album qu'il nous fallait. C'était donc cet album qu'il me fallait. En 2022, j'étais parti sur un choix très politique et militant. En 2023, c'est un autre choix politique et militant, mais avec une approche différente de la lutte. Car, pour évoquer un autre groupe fort politique, la joie est aussi un acte de résistance. That! Feels Good! est un disque terriblement joyeux, un disque de plaisir, un disque souvent extatique. C'est une ode à la liberté des corps ("pleasure is a right"), à la liberté des esprits ("free yourself"). Des thèmes issus de la plus pure tradition de la pop et en particulier du disco, mais qui revêtent ici, dans leur expression la plus décomplexée, des allures de manifestes. Si l'époque voit l'expression et parfois les droits des minorités progresser, on subit d'inévitables résistances. Ces expressions et droits sont attaqués de toute part par le vieux monde qui s'agrippe. Les réactionnaires apeurés aboient en meute. Jessie Ware les balaie d'un gracieux revers de main, d'un tintement de perles, d'une ondulation de robe de soirée. Sous des dehors parfois triviaux, That! Feels Good! est la plus belle des profession de foi. Danser, s'amuser, jouir, aimer, vivre comme on le souhaite, en se respectant et en respectant l'autre, quel magnifique programme, quel parfait horizon à peindre par-dessus les ténèbres qui s'amoncèlent. Oui, c'est sans doute une échappatoire, un fol espoir. L'espoir de pouvoir tout recommencer et tout changer (Is this my life? Beginning or end? Can I start again? Can we start again?) C'est l'espoir d'une fin heureuse, ne serait-ce que pour une soirée, pour une nuit. "I know you wanna go to the moon, but if you don't go, you'll never get there..."
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