- Talking Heads : Fear Of Music

- Talking Heads : Remain In Light

- Terrorvision : Regular Urban Survivors

- Throbbing Gristle

- Traci Lords : 1000 Fires

- The Unicorns : Who Will Cut Our Hair When We're Gone

- U2

- The Velvet Underground & Nico

- Tom Waits : Bone Machine

- Scott Walker : Tilt

- Whale : We Care

- Stevie Wonder : Innervisions

- Faye Wong : Impatience

- Faye Wong : Scenic Tour

- Neil Young : After The Gold Rush

- Neil Young : On The Beach

- Neil Young : Tonight's The Night

- Neil Young : Rust Never Sleeps

- The Zombies : Odessey and Oracle

 

- Talking Heads : Fear Of Music (1979)

        Cet album, contrairement à Remain In Light est très facile à défendre et à glorifier, car il est peut-être le meilleur du groupe. Bon, c'est vraiment très simple à expliquer : Fear Of Music est un bastion inattaquable de pur génie musical. Tout est sublime du début à la fin et il est tellement rare de croiser un disque où toutes les chansons sont réussies que l'on ne peut hésiter, dès la première écoute, Fear Of Music se classe très haut dans la discothèque idéale. Les Talking Heads, comme les Smiths, traînent une réputation de "groupe culte" des années 80. Il y a les fans, des gens dangereux, intégristes, illuminés et il y a les autres, ceux qui n'aiment pas (ça existe) et ceux qui trouvent ça plus ou moins intéressant, mais qui se demandent bien pourquoi on en fait encore des tonnes autour de Byrne ou de Moz en l'an 2000. Bah franchement c'est pas difficile à comprendre. Au même titre que les Clash (Fear Of Music est sorti la même année que London Calling, il faut le noter), les Talking Heads ont ouvert la porte à tout ce qui s'est fait de bien dans les années 80 (en raccourci : les Pixies et puis... euh... quelques autres...). Et comme je le notais en parlant de Sandinista, des albums aussi inventifs, aussi intelligents, qui racontent des choses, tout en restant parfaitement abordables pour le plus grand nombre, auraient dû ouvrir la porte à une décennie dorée. Et on connaît la suite... MTV, Wham, Kylie Minogue, Bon Jovi, Europe... Et on ne retrouva que très très rarement l'influence de Wrong 'Em Boyo ou de Life During Wartime. Bon, justement, j'aimerais revenir juste un poil sur ce fameux album des Talking Heads. Un groupe qui venait d'enchaîner deux chefs-d'oeuvre affolants ('77 et More Songs...) et qui ne pouvait pas se permettre de décevoir. Et pour ne pas être déçu, on n'était pas déçu. Si à partir de Fear Of Music, le repos sur les lauriers survient doucement mais sûrement (cf Remain In Light, un autre chef-d'oeuvre pourtant), ce disque est un point d'ancrage aussi important que The Queen Is Dead ou que Doolittle. Influences africaines, faisant échos aux "empreints" reggae des Clash (influences qui seront bientôt digérées et exaltés par les Banshees, autre groupe fondamental mais nettement plus sous-estimé), dès l'ouverture avec I Zimbra (Phil Collins a dû trop écouter cette chanson, on a l'impression qu'il essaie de la refaire (sans y parvenir, évidemment) depuis 25 ans...). Mais à ce pur tour de force d'entrée en matière répond une vraie intelligence musicale et une encore plus grande intelligence des textes. Des textes qui ont eu autant d'influence sur beaucoup de gentils étudiants que ceux de Morrissey sur d'autres (et certains gentils étudiants ont fait un panaché des deux... c'est dire).

        Rapidement on est cloué à son fauteuil, c'est trop beau pour être vrai. Byrne est un artiste "habité", c'est indéniable (et cela bien avant d'avoir découvert la réalité encore plus effroyable avec Stop Making Sense). Ecoutez-le sur le bouleversant (voire traumatisant) Memories Can't Wait. Ah oui... C'est aussi touchant que Love Will Tear Us Apart ou que Like A Hurricane. Et juste après c'est un délire comme Air ou comme Animals qui vient ouvrir un champ d'attaque incroyable au groupe. Chaque chanson est différente, chaque chanson possède sa propre histoire, sa propre atmosphère, sa propre personnalité. Et même si l'on sait depuis longtemps que Brian Eno n'est pas un manche en matière de production, il est ici au sommet de sa créativité artistique. Une preuve de plus ? Heaven, un morceau qui flirte entre la pop et le arty, et sur lequel on écraserait bien une larme ou même deux. "Heaven Is A Place Where Nothing Ever Happens". Non, aller, ne nous mentons pas, c'est diaboliquement émouvant et nous sommes en 1979 ! Inutile de vous dire que certains sauront se souvenir des Talking Heads (de Cure aux Smiths en passant par U2). Si les Talking Heads furent la bande son idéale des années 80 "tout-pour-le-fric-la-mode-et-l'apparence" avec des hymnes qui peuvent changer une vie tels que Life During Wartime, Once In A Lifetime ou Road To Nowhere. Et bien je crois que je ne surprendrais personne en affirmant que les Talking Heads sont (re)devenus d'une actualité brûlante en ces temps d'entreprenautes et de start-up. Les néo-yuppies virtuels devraient-ils se replonger dans une intégrale Talking Heads ? Ou faut-il s'attendre dans un avenir proche à un nouveau Once In Lifetime qui se demanderait : "what is this beautiful computer ? what is this beautiful modem ? what is this beautiful cyber-bimbo ?" ... Possible... Mais ce ne serait qu'un remake, et rien ne pourra remplacer les originaux. Donc, qui que vous soyez, quel que soit votre âge, Fear Of Music et finalement tout ce qui porte le nom de Talking Heads, vous est indispensable. "Drugs Won't Change You. Religion Won't Change You. I Need Something To Change Your Mind..."

Ma page Fear Of Music

 

- Talking Heads : Remain In Light (1980)

        L'embêtant avec cet album c'est qu'il n'est ni le meilleur, ni le plus facile à défendre des Talking Heads, phénoménal groupe devant l'éternel. Avec le premier, c'est pourtant le plus connu, grâce à l'hymne intemporel : Once In A Lifetime. Enorme succès en son temps, Remain In Light a quand même un peu sombré dans l'oubli, au profit de la sublime compilation Sand In The Vaseline (rien que le titre...) et du Talking Heads '77. C'est un tort. Il n'y a rien à jeter dans Remain In Light, et ce n'est pas plus mal d'avoir LE tube en bonus. C'est un condensé de l'Art de David Byrne et de Brian Eno (en particulier). La voix et les textes de malade dangereux de Byrne, les choeurs et les arrangements d'Eno. La recette est connue, mais elle touche à la perfection. Que des perles, difficile donc de choisir quelques chansons en particulier (il n'y en a que huit, d'ailleurs, mais l'album est en mid price, alors...). Enfin, outre Once In A Lifetime, il y a quand même les grandioses Born Under Punches, Houses In Motion, Seen and not Seen et le fabuleux Listening Wind. C'est à dire tout plein de morceaux absents de la compil, ACHETEZ LES ALBUMS !

 

 

- Terrorvision : Regular Urban Survivors (1996)

        Un petit disque méconnu mais qui est ce que le rock a produit de mieux depuis la séparation des Pixies (pas étonnant vu que c'est Gil Norton qui produit). Le deuxième album de cette bande de déconneurs britons, au dynamisme et à l'humour communicatifs est un véritable petit chef-d'oeuvre. Tous les morceaux sont des petites perles voire de vraies merveilles (le réjouissant Perseverance, l'entêtant Hide The Dead Girl, le grandiose Didn't Bleed Red, l'emphatique et génial Bad Actress, l'irrésistible If I Was You, le délectable Celebrity Hit List...). Regular Urban Survivors prouve que le rock n'est pas mort avec les Pixies. Un délice à passer en boucle les jours de déprime.

 

 

- Throbbing Gristle : tout (ou rien)

        Ce qu'il y a de bien avec le Throbbing Gristle du bon vieux Genesis P-Orridge (dont on reconnaîtra bien un jour qu'il est Dieu), c'est que l'on peut taper dans n'importe quel disque (live, album, compil...) avec bonheur (bon OK, pour les lives faut déjà être sérieusement atteint). Pour tous ceux qui veulent découvrir les limites de la musique, pour tous ceux qui veulent entendre quelque chose qui ne ressemble VRAIMENT à rien d'autre, pour tous ceux qui croient que la techno expérimentale date des années 90 et qu'elle a inventé des trucs, pour tous ceux qui désirent épater leur petits camarades avec de la "musique" que l'on n'entend pas tous les jours, c'est de l'impeccable. Bon, OK, si votre groupe favori est les Smiths ou Cast, c'est peut-être pas gagné. Mais bon, je ne peux que très très très fortement conseiller au minimum l'écoute de 2nd Annual Report (de 1977 !), de D.O.A. ou de Heathen Earth, vous n'en reviendrez pas (si si, vous n'en reviendrez VRAIMENT pas). Et si tout fonctionne comme prévu, vous finirez par vider votre discothèque pour ne garder que du Throbbing Gristle, qui remplace sans problème tous les autres artistes, tout genre confondu.

 

 

- Traci Lords : 1000 Fires (1995)

        Je parle de la Miss et de son sublime album sur une page entièrement dédiée à la Lords. So, Go there ! Enfin, en résumé 1000 Fires est l'un des meilleurs disques de Dance de tous les temps.

 

 

- The Unicorns : Who Will Cut Our Hair When We're Gone ? (2003)

        On ne peut pas véritablement expliquer le charme incroyable que dégage ce premier album de l'extrêmement prometteur duo canadien des Unicorns. En même temps, si, c'est très simple de l'évoquer. Dans un format qui refuse absolument les bases "couple/refrain", les Unicorns nous offrent le meilleur album de pop-rock depuis les Pixies. Ah mais oui ! C'est aussi bien que cela ! Même mieux que Supergrass. Absolument toutes les chanson sont accrocheuses et possèdent au moins un gimmick inoubliable. Et l'enchaînement des 6 premières chansons évoque de manière troublante l'ouverture mythique de Trompe Le Monde des Pixies. On reste étonné. Surtout que les paroles n'auraient pas été reniées par un Black Francis au meilleur de sa forme. Des histoires de fantômes, de licornes, mais surtout la mort évoquée sur tous les tons et avec une crudité et un humour formidables. Le disque est drôle et parfois étrangement touchant. Un petit chef-d'œuvre, qui pourrait devenir encore plus grand avec le temps.

 

 

U2 : War, The Joshua Tree, Achtung Baby, Zooropa

        Difficile de sortir un seul album en particulier de la carrière de U2. C'est en effet un groupe qui n'a jamais véritablement sorti un album entièrement réussi. On ne peut pas dire pour autant que U2 soit un groupe à singles, car les meilleures chansons ne sont pas forcément les plus connues. Disons que tous les disques du groupe s'écoutent sans déplaisir particulier. Mais qu'ils comportent toujours quelques points faibles. Pas si mal finalement, vu que cela fait ressortir la qualité mélodique indéniable de certaines perles. Sur War par exemple, outre le très réussi New Year's Day ; Seconds, Two Hearts Beat As One ou "40" sont de réelles réussites. De même sur The Joshua Tree, la meilleure chanson du disque étant logiquement (pour une fois) la plus connue : Where The Streets Have No Name, mais sinon on retiendra en particulier l'excellent Bullet The Blue Sky ou le Pop-ement parfait In God's Country. Sur Achtung Baby les choses se corsent un peu plus. C'est peut-être le meilleur album du groupe en tout cas celui qui possède la plus forte cohérence (avec son successeur direct). One est définitivement l'une des plus belles chansons du monde (et la plus réussie du groupe). Sinon il n'y a pas véritablement de point d'orgue sur Achtung Baby, les morceaux s'enchainent en douceur sans que l'un d'entre eux fasse particulièrement la différence (à part One, bien sûr). On retiendra quand même The Fly (pour le renouveau du son de U2) et Love Is Blindness, magique conclusion qui doit quand même un peu à Suicide (tiens, tiens...). Zooropa est quant à lui l'album le plus intéressant du groupe. Le plus novateur, le plus expérimental, le plus passionant. Plus difficile que Achtung Baby mais finalement aussi indispensable. Là encore c'est une oeuvre très cohérente dont il est difficile d'extraire un titre en particulier (Lemon ? Zooropa ? Stay ? The First Time ?) Et finalement c'est peut-être LE chef-d'eeuvre de U2. Quant aux autres productions du groupe, ben c'est effectivement à juger chanson par chanson (un Pride par ci, un Gloria par là, etc...).

 

 

 

The Velvet Underground & Nico (1967)

        Un des 10 plus grands disques du siècle et sans aucun doute l'un des albums les plus importants de l'histoire du Rock. Sorti en 1967, ce chef-d'oeuvre absolu n'a pas pris l'ombre d'une ride. Toutes les chansons sans exception sont géniales et historiques. La production de Warhol est incroyable. L'écriture de Lou Reed ne retrouvera jamais un tel niveau de folie et d'originalité. Cela débute en douceur sur la ritournelle du gracieux Sunday Morning (Lou Reed n'a jamais aussi bien "chanté"), puis c'est le percutant I'm Waiting For The Man (tout le style Lou Reed est dans cette chanson), ensuite c'est l'incroyable Femme Fatale où Nico chante (!) de manière tétanisante (et les choeurs sont faux comme c'est pas permis), Venus In Furs est la plus belle chanson SM de tous les temps et John Cale y est impressionant (comme d'habitude), Run Run Run crépite comme les griffes d'un chat enragé dans une poubelle en fer (les solos de Sterling Morrison se barrent en larsens monstrueux), All Tomorrow's Parties (la chanson favorite de Warhol) est une nouvelle performance de Nico sur un monument Gothique, Heroin est une épopée de guitaristes sur des paroles hallucinantes du jeune Lou Reed, There She Goes Again est une symbiose contre-nature entre les Beach Boys et le Lou, I'll Be Your Mirror est un nouveau feux d'artifice Nico, The Black Angel's Death Song est une incroyable ballade où résonne le violon dingue de Cale, enfin European Son est ni plus ni moins que le morceau qui a inspiré presque toutes les compositions de Sonic Youth, un délire génial en avance d'au moins 15 ans sur son époque. Un album vital donc.

 

 

- Tom Waits : Bone Machine(1992)

 

 

- Scott Walker : Tilt (1995)

        Et si Tilt était finalement le disque le plus mythique des années 90 ? L'affirmation peut paraître audacieuse, incongrue, surtout si l'on pense à de sérieux prétendants au même titre tels que Nevermind, Grace, Loveless, Blue Lines ou bien encore OK Computer. Mais Tilt répond à toutes les caractéristiques de l'oeuvre "culte" telle que la culture populaire aime à la définir. Adoré par un tout petit nombre d'adeptes névrosés, remisé au placard par tous ceux qui ont été rebutés par son hermétisme et ignoré par la majorité, Tilt est un disque comme il en existe bien peu dans le monde de la musique rock/pop. On le rapprochera peut-être, vaguement, des oeuvres austères et tranchantes de Nico (The Marble Index en tête), voisines par leurs errances dans des territoires proches de la musique concrète. Mais finalement rien ne ressemble à Tilt. Pour pouvoir entrer dans cet album, et tout le monde vous dira que c'est très difficile, il faut le vouloir, il faut s'en donner les moyens. Il faut attendre le soir, éteindre toutes les lumières, être seul bien sûr et mettre le son très fort. Très très fort. Tilt est un disque qui s'apprécie à plein régime et finalement bien plus dans "l'espace" que lors d'une écoute au casque. 

        Pour preuve, la baroque ouverture sur le sublime Farmer In The City et sa puissance de cathédrale gothique. La voix de Scott Walker, mille fois imitée (Bowie, Jarvis Cocker, Iggy Pop, et j'en passe...) nous saisit immédiatement à la gorge, elle nous travaille au physique, à la décharge émotionnelle directe. Ceux qui trouvent Ian Curtis "grandiloquent" ne s'en remettront pas. Scott Walker déclame, toujours au bord de la folie, au bord de la rupture, personne ne chante comme lui. Et pour accompagner sa voix et ses textes auxquels on ne comprend rien ("est-ce que j'ai entendu 21 ?"), il choisit une musique incroyablement maîtrisée mais qui n'offre jamais la moindre prise, la moindre accroche, la moindre petite concession qui nous permettrait de nous y accrocher dans le confort et la facilité. Tout est extrêmement exigeant. Mais cette exigeance est à la hauteur de la beauté du disque : infinie. On peut difficilement évoquer Tilt, car c'est expérience que chacun se doit de tenter, au moins une fois, même si en général il faut des mois, voire des années pour s'imprégner de ce disque. Mais une fois que l'on vit à travers la musique de Scott Walker, on ne peut plus s'en passer, elle nous fascine, elle nous obsède, on y revient toujours, halluciné que de tels sons, que de tels choses puissent exister. Tilt est unique et c'est sans doute l'album pop le plus novateur et peut-être le plus beau de ces 15 dernières années. Bien évidemment, il fait partie du Top 10 de la discothèque idéale.

 

 

- Whale : We Care (1995)

        Le premier album de Whale est une petite perle trop vite oubliée. Un patchwork franchement réjouissant, et limite génial par moments, qui massacre le trip-hop, le métal, le punk, le gospel, la folk avec une énergie et une perversité assez hallucinantes. Ce n'est pas pour rien que Tricky himself est venu prêté main forte sur le premier titre de l'album, le déjanté et très représentatif Kickin'. Y a du Beck là-dedans, c'est clair. Mais quand des boucheries merveilleuses telles que Pay For Me ou Hobo Humpin' Slobo Babe (le clip fut un tube) débarquent, on touche le Paradis. Mais surtout il n'y a rien à jeter sur ce long album vraiment fracassé dans sa tête et c'est le plus important. La chanteuse a la voix la plus perverse depuis... foulala... Madonna sur Erotica ? Les chœurs sont effroyables, les sonorités massivement dissonantes, l'inventivité est à toutes les notes. Un disque très varié (tant mieux ça nous change des petits gars de Bristol), très drôle (Young Dumb N' Full Of Cum), très énergique (I'll Do Ya), fou à lier (That's Where It's At), mais aussi joliment planant (I'm Cold). En bref : à redécouvrir.

 

 

- Stevie Wonder : Innervisions (1973)

        Si vous ne devez n'en posséder qu'un du "wonderboy" (ce qui serait dommage), c'est celui-là qu'il vous faut. De tout façon, aucune discothèque digne du nom "d'idéale" n'est complète sans Innervisions et Songs In The Key Of Life (au minimum). Poursuivant le miracle de Talking Book, Stevie Wonder délivre avec Innervisions une oeuvre parfaite, belle à en mourir. Seulement 9 chansons, mais quelles chansons ! Que des chefs-d'oeuvre qui contiennent en eux les 25 années de musique "noire" qui suivront. Aujourd'hui encore, pas un tube rap qui ne sample (pille) Stevie Wonder, pas un morceau de funk ou de néo disco qui ne lui doivent tout ou presque. En usant et abusant des sonorités minimalistes de ce début des années 70 (les premiers synthés), Wonder transcende des mélodies et des textes fabuleux. Il y a les sommets funks toujours imités, jamais dépassés (Too High, Living For The City, Higher Ground, Don't You Worry 'Bout A Thing) et les ballades bouleversantes (Visions, Golden Lady, All In Love Is Fair, He's Misstra Know-It-All), tout est sublime. On pourra beaucoup pleurer sur la descendance de Stevie Wonder et de ce que lui-même est devenu avec les années 80. Mais on ne pourra que s'incliner devant le génie absolu de ses albums fondateurs, aussi révolutionnaires que délicats. L'archétype du disque de chevet, intemporel et ri-gou-reu-se-ment incontournable.

 

 

- Faye Wong : Scenic Tour (1998)

        Faye Wong est la plus grande star féminine de la chanson de Hong-Kong (avec Anita Mui, la "Madonna asiatique"). Ce qu'il faut déjà noter d'incroyable avant de parler de cet album (le meilleur d'après moi et le dernier en date) de Faye Wong, c'est que celle-ci, à près de 30 ans, fait encore figure de jeune fille éthérée (Britney Spears en comparaison ressemble à Mireille Mathieu). Faye Wong possède une voix incroyable, et par moment on se croirait perdu dans un inestimable album d'inédits de Julee Cruise. Ce Scenic Tour est phénoménal. On y entend même des morceaux "sombres" ! En particulier ce Emotional Life qui ouvre le disque, transporté par des sonorités de toute beauté. Et dans l'ensemble il n'y a absolument rien à jeter sur cet album que l'on apprécie au fil des écoutes (seul le dernier morceau est un peu limite, une rythmique dance et la voix de la fille de Faye rendent la chose assez ridicule). On ajoute à ce tableau parfait un maxi cd bonus tout aussi exceptionnel (les mêmes arrangements que certaines chansons de l'album mais on s'en fout, on en redemande), ainsi qu'un emballage magnifique et hop ! On tient une merveille !

Ma page Impatience

 

- Neil Young : After The Gold Rush (1970)

        L'un des plus importants chefs-d'œuvre du folk-rock-country, au même titre que Highway 61 Revisited (par exemple) et peut-être le chef-d'œuvre de Neil Young, mais de cela on pourrait discuter pendant des jours. Ce qui est sûr c'est que c'est album est une merveille du début (le gracieux Tell Me Why) jusqu'à la fin. Et on passe par le sublime After The Gold Rush, indéniablement l'une des plus belles chansons des années 70 (et dieu sait si Neil Young a délivré bon nombre des plus belles chansons des années 70 : A Man Needs A Maid, Heart Of Gold, Cortez The Killer, Tonight's The Night, Tired Eyes, My My Hey Hey, Powderfinger, etc...). Et aussi, sur cet album fondamental, le légendaire Southern Man, aux paroles légendaires. Un morceau brutal, vibrant, héroïque et d'une fabuleuse intensité musicale. Et en enchaînement, le très court, très entraînant et très lumineux Till The Morning Comes vient relancer le rythme de l'album. Et pour une pure ballade triste country-folk comme Oh Lonesome Me, Neil Young délivre en suivant le tendu Don't Let It Bring You Down. Et de nouveau une ballade bouleversante avec Birds. Puis un rock, puis une ballade (magique, I Believe In You) et un au revoir léger sous la forme de la minute trente de Cripple Creek Ferry. Encore plus que Buffalo Springfield Again, c'est avec cet album que Neil Young a démontré que le terroir de la musique américaine pouvait en remontrer aux arrogants petits anglais.

 

- Neil Young : Tonight's The Night (1975)

        Après ces chefs-d'œuvre du début des années 70 et surtout après Harvest en 1972, Neil Young semble atteindre une impasse artistique et personnelle. La drogue et forcément la mort rôdent dans son entourage. 3 années de chaos plus tard, Neil Young en rage contre le monde entier délivre un album monstre qui est, aujourd'hui encore, considéré comme un monument de la musique de la seconde moitié du 20e siècle. Le chantre du country-folk-rock, met une large dose d'électricité vengeresse dans ses compositions. Le résultat est aussi puissant et novateur que les meilleurs Lou Reed (Berlin et Street Hassle). Et cela dès l'ouverture avec l'hallucinant Tonight's The Night, dopé par une production démentielle (basse en avant, flux et reflux...) et la voix "habitée" d'un Neil Young que l'on ne connaissait pas ainsi. Speakin' Out est plus proche du pub rock que de la country et sur le grandiose World On A String, on réalise bien que cet album n'est pas de ceux que l'on peut considérer à la légère. Tonight's The Night, non seulement possède une charge émotionnelle rare, mais c'est aussi un disque novateur, riche, débordant d'idées et de... musique. Et on pourra dire ce que l'on voudra, on n'en croise pas si souvent que cela des comme ça. Non ? Borrowed Tune ce n'est pas magnifique ? Des chansons comme ça, à la fois bouleversantes et délicatement chaleureuses, qui vous touchent droit au cœur, on en trouve sur Nebraska ou sur Electro-Shock Blues, mais pas chez le commun des "musiciens". Le temps de verser une larme et voilà le maître étalon rock d'une époque : Come On Baby Let's Go Downtown. Encore une bonne occasion de s'extasier sur une production qui associe urgence et mélodie sans jamais faillir. Et sur Mellow My Mind, le grand Neil, la voix cassée, nous démontre, s'il le fallait encore, qu'il faut souffrir pour créer les chefs-d'œuvre émotionnels. Puis une ballade country comme au bon vieux temps, Roll Another Number. Sauf que ce n'est déjà plus le bon vieux temps, et à chaque instant les distorsions de la production et/ou de la voix de Young, viennent contrebalancer des arrangements somptueux (ceux pour guitares, mazette ! ceux pour piano, re-mazette !). Et on en profite pour régler le sort de la génération Woodstock une bonne fois pour toutes. En 1975, Neil Young, en poussant à son paroxysme la logique de Southern Man ou de The Needle And The Damage Is Done, secouait les (déjà) vieux os du rock pépère, encore tout embrouillé dans ses rêves de Flower Power, de Pure Pop et de Prog Rock. Neil Young, mais non ! ce n'est pas le parrain du grunge ! c'est l'oncle du punk et la bonne étoile du rock. Et sur ce Tonight's The Night, celui qui avait jadis posé sa voix sur l'une des plus belles chansons du monde (Expecting To Fly), nous transporte dans des moments rares de musique touchante, "présente", sensuelle même (quand tous les sens sont mis à contribution), comme l'incarne si bien Tired Eyes, morceau qui étonnera sans doute encore les gamins qui découvriront cet album dans 30 ans. Il faut avoir un cœur de pierre et bien peu de sensibilité pour ne pas s'agenouiller devant cet disque indétrônable, que je ne sais plus comment qualifier pour faire comprendre à tous ceux (encore bien trop nombreux) qui ne l'ont pas qu'ils doivent immédiatement courir chez un disquaire quelconque (virtuel ou non) et dépenser la somme "mid price" que mérite largement ce jalon de toute discothèque idéale (tant que vous y êtes, profitez-en pour acquérir les deux autres Neil Young présentés ci-dessus et ci-dessous...). Neil Young vous murmurant "tonight's the night" est un instant que vous n'êtes pas prêts d'oublier.

 

- Neil Young : Rust Never Sleeps (1979)

        Comme il avait clôt les années 60 et ouvert la porte des années 70 avec After The Gold Rush, Neil Young met un terme aux années 70 avec cet incroyable album qui débute et s'achève sur l'une des plus grandes chansons de l'histoire du rock : My My Hey Hey (Out Of The Blue), la version acoustique et Hey Hey My My (Into The Black), la version terriblement électrique. Ce My My Hey Hey, qui non seulement fait la jonction musicale entre deux époques, mais mentionne aussi deux événements majeurs de la période, la mort du King (Elvis) et la comète Sex Pistols (Johnny Rotten, qui ne serait finalement pas une si grande icône aujourd'hui sans cet hommage du grand Neil). Et cette chanson (enfin... ces deux chansons) annonce aussi un autre événement clef de l'histoire du rock, le suicide de Kurt Cobain ("it's better to burn out than to fade away"). Et ce n'est pas fini ! Car il y a bien sûr cette ligne en forme de maxime : "Hey Hey My My, Rock'n'Roll Will Never Die". Simple, accrocheur, poétique, fondamental, sublime. Et le reste est de ce niveau. Que ce soit Trasher, Pocahontas ou Sail Away. Sans parler du grandiose Powderfinger et de la fin de l'album noyée sous l'électricité. On dit toujours de Neil Young que parmi tous les "anciens" c'est celui qui a toujours réussi à ne jamais vieillir. Et c'est fantastiquement vrai. A chaque fois qu'on le donnait fini, Neil Young renaissait de ces cendres. Après le début tonitruant du Buffalo Springfield, il signa une flopée de chefs-d'œuvre solo, quand on pense qu'il ne peut faire mieux que The Gold Rush et Harvest, il revient avec le déchirant Tonight's The Night, après la baisse de régime post-Zuma, il dynamite tout avec Rust Never Sleeps et sa tournée situationniste, si les années 80 ne furent pas toujours faciles, il ressuscite, encore ! avec Freedom et Ragged Glory en 1989 et 1990, et surtout avec Sleep With Angels et Mirror Ball, sans parler d'un Unplugged mythique. De toutes les légendes du rock encore en activité, Neil Young est sans doute celui qui collectionne le plus de disques indispensables à toute bonne discothèque. On ne peut pas conseiller un seul album de Neil Young, on ne peut, au strict minimum, qu'en posséder une petite dizaine. Comme qui dirait : incroyable mais vrai ! Hey Hey My My, Rock'n'Roll Will NEVER Die !

 

ma page On The Beach

 

 

  The Zombies : Odessey and Oracle (1968)

        The Beatles, The Beach Boys, The Kinks, certes. Love, aussi, bien sûr. Et puis, The Zombies. Trop méconnus, trop absents de la mémoire musicale qui a tant cultifié et idéalisé les 60's pop. Et pourtant. En découvrant Odessey and Oracle dans nos années 2000, le choc est peut-être encore plus grand qu'à l'époque. Car on connaît par coeur les chefs-d'oeuvre des groupes cités ci-dessus, et pourtant... Et pourtant... Et pourtant Odessey and Oracle nous bouleverse comme si nous n'avions jamais écouté ce genre de musiques. Il y a du Lennon/McCartney, il y a du Brian Wilson, il y a du Ray Davies, chez Argent et White, mais avec une telle perfection, un tel son, de telles idées, une telle émotion, que les influences disparaissent, n'ont jamais existé. Il ne reste qu'un album d'une beauté si pure, si absolue, que l'auditeur se retrouve les larmes aux yeux dès le second morceau, le bouleversant A Rose For Emily, sommet émotionnel juste approché par Hung Up On A Dream, qui pourrait sérieusement concourir au titre de plus grande chanson pop des 60's (et donc de tous les temps).

        Mais des sommets, il y en a douze sur Odessey and Oracle. De l'ouverture aussi enjouée et magnifique qu'étrange (une lettre à une petite amie en prison) de Care of Cell 44, en passant par les harmonies folles de Changes et l'effroi épidermique de Butcher's Tale. La mélancolie de Beechwood Park voisine avec la légèreté lyrique d'un I Want Her She Wants Me ou d'un This Will Be Our Year. Et le single, Time of the Season conclut l'album sur une touche "soul" habitée par une grâce féline. Si vous faites le choix fort judicieux d'acquérir la réédition bourrée de "bonus tracks", vous hériterez de nombreux chefs-d'oeuvre supplémentaires. Notamment le merveilleux I  Call You Mine ou l'intense Imagine The Swan.

        Odessey and Oracle, en lui-même, ses 12 perles qui balaient tout le spectre de la musique pop, n'a besoin d'aucun bonus pour être l'un des plus beaux disques du monde. Délicat et effrayant, bizarre et émouvant, d'une richesse inépuisable. Les Zombies nous ravissent, nous font pleurer, nous offrent l'Eden. L'album idéal pour achever cette discothèque idéale.

 
 
 
 
 
 
 
 
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